Ludification/gamification… derrière ces termes se cache une volonté de renouer avec un de nos mécanismes de réussite les plus efficaces: la motivation par le plaisir. Et quoi de plus plaisant que de réintroduire le jeu dans nos vies professionnelles? J’ai répondu au Figaro sur le sujet, l’occasion de revenir sur divers aspects de la ludification, ses bénéfices et ses limites.
Introduire le divertissement en entreprise
Dans son article Divertir ses employés, une bonne carte à jouer, Quentin Périnel montre des exemples d’introduction du divertissement en entreprises, sous la forme d’éléments ludiques mis à disposition des salariés et à utiliser quand le besoin s’en fait sentir. D’où le terme de ludification, utilisé peut-être à tort (voir plus bas), qui correspond essentiellement au développement du “bien-être au travail”.
De la table de ping-pong à la salle de sieste, du babyfoot au toboggan, les idées ne manquent pas, qui offrent à chacun des alternatives à un mode de travail axé sur la concentration non-stop et les pauses-café pas très déconnectantes.
Le jeu, et par extension le divertissement, sont d’excellents moyens de détourner notre attention d’un problème, d’un dossier prenant. Or, l’excès de focalisation ou de concentration sur le dossier en question génère souvent un manque de recul et des blocages de créativité, quant aux solutions possibles. De là au stress il n’y a pas loin, sans compter le temps perdu.
Une pause ludique, comme aller faire un babyfoot avec son binôme, histoire de décompresser, permet de se mettre la comprenette en veille. Et notre cerveau est une machine formidable, qui profite alors du fait qu’il a le champ libre pour fonctionner à sa manière. C’est ce qu’il fait, sans même que nous ne nous en rendions compte et il est fréquent que l’idée de génie fuse au milieu de la partie.
De même pour le passage par la salle de sieste, où l’on peut laisser son esprit vagabonder à loisir, sachant que la rêverie est l’un des moments où le cerveau fonctionne le plus à toute vapeur, mais en mode bride sur le cou plutôt que sous la contrainte de la pensée rationnelle. Du coup, il se régale à fonctionner comme bon lui semble et il gagne considérablement en efficacité. Voir:
La ludification n’est pas (que) le divertissement
La ludification ne s’arrête pas à la simple introduction de zones de divertissements dans l’espace de travail. Il convient certainement d’en distinguer trois aspects:
- L’apport ludique dans l’environnement de travail, dont nous venons de parler
- Les serious games ou l’apprentissage par le jeu
- Les innovation games, ou ateliers ludiques: travailler sous forme de jeu. Voir la vidéo de Gilles Mantel sur le sujet
Les limites du jeu au boulot
Le divertissement tel qu’il est décrit plus haut reste malheureusement trop souvent du ripolinage RH, une jolie couche de peinture qui masque le salpêtre du management délétère et lui évite de se remettre en question, mais sur laquelle les entreprises communiquent à fond, histoire de se dorer la marque employeur.
La gamification, les “jeux sérieux” (voilà un oxymore de mauvaise augure), quant à eux, ont fait l’objet d’un véritable engouement et les réflexions sur leurs limites commencent à pointer leur nez. Comme souvent, ce n’est pas tant l’idée qui est mauvaise que ses excès d’utilisation, ou une utilisation non réfléchie:
- Bertrand Duperrin explique que La gamification ne crée par de l’engagement mais de l’addiction
- Quentin Périnel cite un exemple donné par Stéphane Le Lay, sociologue du travail: le jeu orienté sur la course à la productivité, qui devient une farce sinistre, usine à gaz de risques psychosociaux.
- Anthony Poncier s’est interrogé sur les dérives possibles de la gamification
- Déjà, en 2011, Yann Leroux pointait du doigt les illusions de la gamification
Voir aussi
#HackHR : balade médiévale au pays de la prévention du stress
Job idéal: les 7 ingrédients du plaisir au travail
Boulot idéal: une réalité à inventer?
Construire le bien-être au travail
Des solutions simples pour améliorer le quotidien au travail
Aller plus loin
Vous voulez construire une vie professionnelle réjouissante et conforme à vos aspirations? Pensez au coaching. Pour tous renseignements, contactez Sylvaine Pascual
Je lis régulièrement votre blogue et j’apprécie beaucoup vos interventions. Mais dans ce cas-ci je me dois de vous contredire : La ludification n’a RIEN à voir avec “la simple introduction de zones de divertissements dans l’espace de travail.” Distraire les gens au travail c’est en fait le contraire de ludifier le travail. Dès que vous sortez de la tâche de travail, vous ne faites pas de ludification. La ludification est, entre autre, le processus (nouveau, complexe et long) d’utiliser les leviers des jeux (surtout les jeux vidéos) pour rendre moins pénible une tâche. Cette nouvelle impulsion de la pratique et la recherche récente en gestion s’appuie surtout sur les recherches de Mihály Csíkszentmihályi sur le Flow. Je vous conseille aussi les travaux de Jane McGonigal pour en savoir plus ou même l’article sur la gamification dans Wikipedia (hélas, sa traduction française n’est pas à la hauteur de l’original en anglais).
Arf, c’est le terme qui avait été utilisé dans l’article, pour éviter le très vilain barbarisme “gamification”. Merci pour ces précisions!
Très bon article!
Dommage que la majorité d’entreprises ne suivent pas cette technique. Ca aurait pu aider les employés à augmenter leur productivité.
Merci!
En fait, les entreprises commencent à explorer des moyens de remettre du fun et du jeu dans le quotidien professionnel des salariés.
Merci pour cet article que j’ai beaucoup apprécié. En effet, le bien être en entreprise, ainsi que l’augmentation de la productivité par divers moyens m’intéresse. J’ai quelques idées, et un projet en tête, et j’aimerais pouvoir échanger quelques mails (privés) avec vous Sylvaine Pascual.
Cordialement Nicolas H.
Bonjour Nicolas,
N’hésitez pas à me contacter via le site;)
L’activité physique, le temps que l’on s’accorde, les voyages et la façon dont on prend soin de soi sont la clé du de la forme !
En très grande partie, oui;)