Le bonheur, c’est les autres!

 

Qu’est-ce qui nous rend vraiment heureux? L’étude a plus longue de l’histoire rapportée par le psychiatre chercheur Robert Waldinger dans une conférence TED, est catégorique, il n’y a qu’une seule chose qui garantit et entretient le sentiment d’être heureux. Ce n’est ni la méditation ni l’argent: ce sont les relations sociales réjouissantes. 

Des relations sociales chaleureuses et sur lesquelles on peut compter garantissent le sentiment d'être heureux

 

Ce qui nous rend heureux : erreurs et préjugés

Qu’est-ce qui nous rend vraiment heureux dans la vie ? Si nous devions investir aujourd’hui dans un nous-même de demain le plus heureux possible, à quel domaine consacrerions-nous le plus de temps et d’énergie ? Autant ne pas perdre trop de temps à chercher une réponse : nous sommes dans l’ensemble pas très doués pour évaluer nos émotions futures d’une part et pour identifier ce qui nous rendrait heureux d’autre part.

En voici deux exemples :

  • Richesse et célébrité: Selon Robert Waldinger, une étude américaine récente a demandé à des jeunes adultes de la génération Z quels étaient leurs objectifs dans la vie. 80% ont répondu « devenir riche » et 50% « devenir célèbre ». Ce serait presque touchant si ça n’était pas un poil confondant de naïveté, cette version génération téléréalité mâtinée de culture américaine qui augmente encore probablement le chiffre (la culte américain de l’argent a des racines protestantes : le revenu du travail étant considéré comme un don de Dieu*) : on sait depuis longtemps qu’être riche et célèbre n’apporte pas exactement le bonheur, que l’argent n’est pas une source de motivation en tant que telle et pourtant, les deux restent les faux fleurons de nos aspirations.
  • Efforts et échelons: On nous dit et on nous répète que pour être heureux et satisfait au travail, il faut s’investir, travailler dur, faire des efforts, ne pas compter ses heures afin de grimper les échelons et, de promotion en promotion, de parvenir à des sommets de responsabilités, d’accomplir ainsi de grandes choses. Et ce des deux côtés de l’Atlantique, puisqu’ici c’est Robert Waldinger qui en parle, les Etats-Unis n’étant pas toujours l’Eldorado aux rues pavées de fromage auquel on aimerait tant croire. La réussite professionnelle reste fortement une question de statut et très ancrée dans la carrière linéaire, mais si celle-ci est de moins en moins une réalité.

 

Reconnaissance et soutien

Ce qui est intéressant, c’est que ces deux aspirations auxquelles nous croyons et tenons fermement ne sont que des éléments de reconnaissance externe qui ne nourrissent qu’en apparence le sentiment d’être heureux. Dès lors qu’il est essentiellement soumis au regard et à l’approbation d’autrui, le besoin de reconnaissance devient une façon d’accorder le pouvoir aux autres de déterminer notre valeur et de leur soumettre une estime de soi du coup forcément fluctuante. Tout ça ne nourrit pas le sentiment de reconnaissance interne et une image de soi stables qui sont génératrice de reconnaissance externe en tant que personne et non par le statut. Voir:

combler son besoin de reconnaissance

Bref, nous sommes complètement à côté de la plaque quand il s’agit de déterminer ce qui va nous rendre heureux de façon durable et stable. Ce n’est pourtant qu’une question de bon sens qui devient rapidement une évidence lorsqu’on la formule. Il ne s’agit ni de travailler dur, ni de gagner de l’argent et encore moins la célébrité. Il s’agit d’avoir des relations de qualité dans lesquelles, entre autres, on peut compter les uns sur les autres en cas de pépin.

Ce n’est pas une surprise. Allons-y pour la platitude de 10h32 (heure à laquelle je rédige;) : l’Homme, cet animal grégaire, a des besoins socio-affectifs énormes, des besoins de reconnaissance et d’appartenance fondamentaux, qui se traduisent entre autres par la confiance et le soutien mutuel et qu’illustrent parfaitement cette étude menée depuis plus de 75 ans et dont Robert Waldinger est le 4ème directeur et qu’il relate dans cette vidéo du TED.

Menée depuis 1938 sur 724 hommes, une partie d’étudiants à Harvard, une partie issue des quartiers pauvres de Boston, cette étude fascinante a observé les évolutions de chacun tous les deux ans, évolutions sociales, morales, physiques et professionnelles.

Waldinger explique qu’au cours de cette étude, ils sont devenus ouvriers, avocats, maçons ou médecins, certains sont devenus alcooliques, d’autres schyzophrènes, certains ont grimpé l’échelle sociale, d’autres l’ont descendue, l’un d’entre eux est même devenu président des Etats-Unis. Et de tout cela il est ressorti un enseignement unique et essentiel : ce sont les bonnes relations sociales qui donnent le sentiment d’être heureux et rien d’autre. Voici les trois bénéfices des relations sociales réjouissantes:

 

Les bonnes relations nous entretiennent

De façon générale, ceux qui ont des relations satisfaisantes et se sentent connectés à leur famille, leurs amis et leur(s) communauté(s) sont plus heureux, en meilleure santé et vivent plus longtemps. En revanche, la solitude subie, le sentiment d’être isolé plus qu’on aimerait l’être sont moins heureux, en moins bonne santé et ils meurent plus jeunes.

 

Les bonnes relations préservent le cerveau

Les relations satisfaisantes protègent le cerveau. Les personnes entourées de personnes sur lesquelles elles peuvent vraiment compter en cas de coup dur voient leurs fonctions cérébrales décliner plus tard et leur mémoire est meilleure. Waldinger souligne que ces relations solides et chaleureuses n’ont pas besoin d’être heureuses en permanence. Certains couples octogénaires de l’étude pouvaient même se chamailler régulièrement, du moment qu’ils avaient le sentiment de pouvoir compter sur l’autre en cas de problème, ces querelles n’avaient pas d’incidence sur leur mémoire.

 

La qualité, pas la quantité

Comme souvent, c’est la qualité qui compte et non pas la quantité. Peu importe le nombre d’amis, c’est bien la nature des relations qui importe. Vivre dans les conflits ne vaut pas mieux que se sentir seul. Ainsi, une relation maritale difficile et dépourvue d’affection peut être mauvaise pour la santé et parfois pire qu’un divorce. A l’inverse, des relations chaleureuses et affectueuses sont nourrissantes et protectrices.

les relations sociales réjouissantes garantissent le sentiment d'être heureux

 

Plaisir au travail et relations réjouissantes

La conclusion de cette étude n’est, pour Robert Waldinger, ni plus ni moins qu’une sagesse vieille comme le monde. Pourquoi alors est-elle si difficile à accepter et si simple à ignorer? Parce que nous sommes des êtres humains en quête de facilité, d’une recette qui nous permettrait d’être heureux facilement et de le rester. Or les relations ne sont pas simples. La plupart du temps, nos relations familiales, amicales ou professionnelles ne sont ni sexy, ni glamour, elles sont problématiques, compliquées, elles requièrent du temps, de l’implication, des efforts (en particulier sur le plan de la communication). Et souvent, nous renonçons à y investir quoi que ce soit, en particulier dans la sphère personnelle que personnelle, pour plusieurs raisons:

– Parce que nous ne savons pas comment nous y prendre ou par où commencer
– Parce que nous avons peu conscience de notre propre degré de pénibilité et avons tendance à blâmer les autres
– Parce que nous croyons que c’est l’autre qui doit changer et surtout pas nous, jolies colombes de la paix qui n’avons rien à nous reprocher
– Parce que nous sommes convaincus que gentillesse et amabilité sont des marques de faiblesse alors qu’elles sont des preuves de courage, tant qu’elles ne s’expriment pas en version serpillière.
– Parce que nous ignorons notre marge de manœuvre dans l’amélioration possible de nos relations

Nous nous retrouvons alors en pleine valse des rôles relationnels, à jouer les Sauveurs, Victimes ou Persécuteurs, à jouer des jeux de pouvoirs vains et toxiques, à chercher à convaincre, à avoir le dernier mot, à rouleau-compresser nos contemporains à coup de communication peu pacifique, à jouer toutes les gammes de l’égo au lieu de jouer la carte de l’élégance relationnelle et des comportements pro-sociaux qui nous permettraient de construire un environnement relationnel serein nourrissant et mutuellement profitable, fait d’entraide et de coopération, de bienveillance et d’affection.

triplette élégance relationnelle

Pourtant, pour 83% d’entre nous, la satisfaction professionnelle est directement liée à la qualité des relations.  Au travail comme dans tous les domaines de notre vie, les relations sont au cœur à la fois du plaisir au travail et de la concrétisation des aspirations professionnelles, quelles qu’elles soient. Elles participent de l’entretien de l’estime de soi et de la confiance en soi et inversement s’en nourrissent. C’est la raison pour laquelle je mets les relations au centre de tous les accompagnements d’Ithaque, autant en reconversion qu’en création d’entreprise  ou en développement du plaisir au travail.

Bref, nous pouvons continuer à croire que l’enfer c’est les autres, mais il se trouve qu’en réalité, le bonheur c’est les autres, aussi mettons un peu d’huile (de coude) dans nos relations, histoire de construire un plaisir au travail roboratif pour le corps et l’esprit! Et pour se faire, comme nous en avons finalement immensément besoin, je vous propose de parler très prochainement d’amour au travail (dans le sens besoins socio-affectifs, pas dans le sens 5 à 7 crapuleux^^) et de compétences relationnelles à renforcer pour garantir plus de plaisir au travail.

 

Et vous, qui vous rend heureux?
Quelles sont les bonnes relations à entretenir, à développer, à regarder grandir?
Quelles sont les relations pénibles dont il est temps de se préoccuper?
Quelles sont les relations vraiment lourdingues dont il est temps de se débarrasser?

 

*Lire à ce sujet ce passionnant article qui éclaire sur l’origine culturelle et religieuse du rapport à l’argent en France et aux Etats-Unis en nous épargnant les épuisants raccourcis sur la relation « décomplexée » des Américains à l’argent.

 

Voir aussi

Appartenance et résilience collective
Meilleur de soi, pire de soi et pomme de discorde
L’humilité et la reconnaissance au service du collectif

 

 

 

6 Comments

  • Camille dit :

    Article rempli de vérité ! Je me sens concernée par cela de par ma situation professionnelle et personnelle. Pour parler un peu de moi, j’ai commencé par me tourner vers une grande école de commerce car je voulais essentiellement gravir les échelons et décrocher le poste qui me ferait gagner le jackpot. Cependant, j’ai vite changé d’objectif car j’ai rapidement compris que ma vie serait plus axée sur le côté professionnel que sur le plan personnel. Ce n’était finalement pas ce qui me rendrait heureuse. J’ai donc préféré oublier le fait de franchir tous les obstacles qui m’empêcheraient d’atteindre le top pour retrouver de réelles relations sociales. Je suis actuellement dans une boîte de recrutement et tout se passe pour le mieux avec mon équipe commerciale. Je suis bien plus épanouïe qu’avant et je souhaite à tous de trouver le bonheur professionnel que je vis actuellement !

    • Merci Camille pour ce témoignage! Il montre que la réussite professionnelle n’est pas (nécessairement) grimper les échelons, elle est la définition que nous en faisons, en fonction de ce qui nous rend heureux et fiers de nous-mêmes. Ca me réjouit toujours de lire ou d’entendre les parcours de ceux qui ont compris l’importance de cette définition personnelle et qui ont agi pour s’en rapprocher, car les gens heureux sont contagieux;)

  • Anne-Sophie dit :

    ***Le bonheur, c’est les autres, OUI !”***
    QUI me rend heureuse ? Hummm… moi. Je crois bien en être la seule capable et responsable.
    Seule à la tête de l’entreprise qu’est mon bonheur, je trime joyeusement 😉
    Et comme je trime, il y a croissance. Et comme il y a croissance, j’augmente ou j’embauche – c’est selon – tous ceux qui contribuent à, et respectent ce bonheur.
    Cela étant, je dois avouer être entourée d’un “board” sans lequel cette entreprise n’existerait pas : des parents en or, un meilleur ami, ma soeur, un frère de coeur, celui que j’appelle mon allié, et ces heureuses rencontres, réelles ou virtuelles, en chair ou en papier, personnelles et professionnelles, qui éclairent la vie. A eux tous : merci !
    Ce qui nous ramène à la “reconnaissance”, celle qui nous permet de prendre conscience et reconnaître qu’on est heureux. Et vous, envers qui êtes-vous reconnaissant ?

    • Au delà du fait qu’il vaut mieux être capable d’hêtre heureux par soi-même, nous avons tous des gens qui embellissent notre vie, qui sont autant de cerises sur autant de gâteaux et j’abonde: nous pouvons leur être reconnaissants des personnes magnifiques qu’ils sont!

  • Nathalie dit :

    Chère Sylvaine,
    Merci pour votre contagieuse bonne humeur et votre bon sens et votre joie de vivre et le plaisir que vous offrez par la lecture de vos écrits et …
    Bref, merci à vous d’exister et de partager Qui vous êtes 😀
    Et oui, vive les relations enrichissantes, les heureuses rencontres qui nous font grandir, qui nous exhortent à partager le meilleur de soi…

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