Sylvaine Pascual – Publié dans: Vie professionnelle
Où je me permet une improbable comparaison entre la recherche d’emploi et celle d’une écurie pour mon vieux cheval. Les deux ont un point commun essentiel: ils nécessitent une certaine authenticité que les idées reçues voudraient nous faire remettre dans notre poche avec un mouchoir par dessus. A tort! |
Cahier des charges
Vous vous souvenez de mon Bourrin Basque? Je suis en quête d’un nouveau logement pour lui, avant qu’il ne devienne SDF pour cause de fermeture de l’écurie où il vit. Et ça n’est pas une mince affaire.
Pour tout vous avouer, je vous en ai fait une description qui, quoi que totalement exacte, est sans doute un doux euphémisme. Sous ses airs de petit Pépé des équidés trop mignon à qui on donnerait un tombereau de carottes sans confession, c’est en réalité un croisement improbable entre Bugs Bunny, pour l’arrogance faussement placide et Taz pour le côté tornade inarrêtable.
Du haut de ses 29 ans, rien ne l’impressionne, ni les portes de boxes, qu’il ouvre sans problème, ni les clôtures électriques, qu’il traverse sans sourciller. Il s’estime en droit de prendre un certain nombres de décisions par lui-même:
- Se déshabiller tout seul (ça surprendra certainement les connaisseurs mais oui, ce cheval-là retire sa couverture tout seul, sans défaire une seule attache)
- A quelle allure il convient de se rendre au pré, quitte à arracher la longe des mains de la personne qui s’était collée à la corvée et à passer la journée avec la longe sous le nez.
- A quelle heure il convient de le rentrer du pré (pas question de se laisser rattraper quand on a pas eu son content)
- Qui a le droit ou non d’aller le chercher au pré (et clairement, le maréchal peut se brosser).
- Et j’en passe.
Mon Pottok a eu raison de la détermination à le soumettre de pas mal de monde, depuis de costauds palefreniers jusqu’à des cavaliers émérites. Du coup, vous imaginez bien que lorsque je suis en quête d’un nouveau logement pour sa jolie frimousse, j’ai un cahier des charges un peu compliqué. Il me faut un lieu relativement sécurisé, sans route à traverser pour aller en extérieur, et dans lequel le personnel est prêt à accepter de l’emmener au pré sans longe, d’avoir régulièrement un œil dessus au cas où il se déshabille (donc des prés à proximité), de réparer les clôtures patiemment et sans m’insulter.
Publicité mensongère
Pourquoi je vous raconte tout ça?
Parce que je pourrais choisir de taire tous ces impératifs pour me faire accepter dans n’importe quelle écurie, tout comme les chercheurs d’emploi peuvent choisir de taire les leurs pour trouver un job. Le risque principal, si je ne dis rien, c’est que l’écurie qui va l’accueillir trouve assez rapidement qu’il y a eu publicité mensongère: ils croyaient récupérer un pépère tranquille et ils se retrouvent avec un Diable de Tasmanie.
Si à l’inverse je brosse un tableau à peu près réaliste de sa capacité à emmerder le monde, je suis certaine qu’un certains nombre d’écuries vont me prier d’aller voir ailleurs. Mais je suis aussi certaine que celle qui va l’accepter va être capable de le gérer. Et comme les écuries abordables disposant de prés en région parisienne sont à peu près aussi rares qu’un job en temps de crise, la comparaison n’est peut-être pas si tirée par la crinière que ça.
Identifier ses limites
Il me semble indispensable pour chaque chercheur d’emploi d’avoir déterminé avec soin les limites de ce qu’il est prêt à accepter et à l’exprimer. Partout, on enjoint aux chercheurs d’emploi d’être “flexibles” (traduisez “corvéables”), et ils finissent ancrés dans une telle peur de ne pas retrouver d’emploi qu’ils se retrouvent à oublier qu’ils sont aussi des êtres humains avec des besoins et des limites, à accepter des jobs qui ne sont pas fait pour eux, sans en anticiper les conséquences potentiellement désastreuses.
Il ne s’agit évidemment pas de se transformer en sac à caprices et de joindre l’interminable liste de ses exigences à son CV, mais bien d’avoir fait le point sur ce qu’on estime totalement inacceptable pour ne pas transiger dessus.
En effet, soit vous n’êtes pas mon Pottok, et l’inacceptable va vous rattrapper. Vous allez finir par subir une situation professionnelle qui ne vous convient pas, avec, entre frustration et ressentiment, un sacré stress potentiel à la clé.
Soit vous êtes mon Pottok, vous ruez inlassablement dans les brancards jusqu’à obtenir satisfaction et votre employeur aura le sentiment d’avoir été floué. Ce n’est pas le stress, mais la porte alors, qui n’est pas loin.
Dans les deux cas, ce sont des solutions qui ne sont pas viables à long terme et qui peuvent mener à la case départ: une autre transition professionnelle pas nécessairement désirée.
Faire preuve de souplesse sur le reste
En revanche, à partir du moment où vous ne transigez pas sur l’inacceptable, il est nécessaire d’être souple sur le reste. Vous pensez bien qu’avec mon cahier des charges, je ne suis pas très regardante sur la propreté des toilettes de l’écurie, la rusticité potentielle des installations, que j’admets de faire quelques kilomètres de plus, et j’ai même fini par faire des concessions sur ce que ça me coûte.
ldem pour la recherche d’un nouvel emploi. Une fois que vous avez défini ce qui est totalement inacceptable, il est tout aussi indispensable d’établir la liste de tous les points sur lesquels vous serez flexible, de façon à trouver un équilibre.
Parce qu’à l’arrivée, ni vous ni moi ne sommes condamnés à subir des situations pénibles, et en même temps, ni vous ni moi ne pouvons être exagérément exigeants: le Bourrin Basque a besoin d’un toit, et vous avez besoin d’un job.
Mini coaching: établir son cahier des charges
Quand nous parlons d’inacceptable, ils s’agit bien d’éléments qui vous font dresser le poil le long de l’échine rien qu’en y pensant, car ces éléments-là seront très rapidement générateurs de stress si vous choisissez de vous asseoir dessus. Il n’y a pas d’échelle ou de règle définissant ce qui est acceptable ou non, hormis la perception que vous en avez. Il peut aussi bien s’agir du temps de transports que de la nature des tâches ou encore de l’environnement de travail, à vous de voir ce qui représente une priorité absolue à vos yeux.
Quelles sont les trois limites sur lesquelles vous ne transigerez pas?
A l’inverse, quels sont les points sur lesquels vous choisissez d’être flexible?
Comment allez-vous inclure ces éléments dans votre recherche d‘emploi?
Nous aurons l’occasion de revenir sur la façon de les exprimer lors d’un entretien d’embauche, qui demande un peu de doigté relationnel et linguistique pour éviter de passer pour un égo surdimensionné aux exigences de starlette de télé-réalité;)
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Un merci chaleureux à mon Colonel (grâce à qui le Bourrin Basque a déménagé en toute quiétude), membre d’honneur de l’inénarrable mini-tribu des MDR, d’abord parce que qu’est-ce qu’on se marre, mais aussi parce que c’est l’association des Mémés Dresseuses de Rétifs, ou encore Mémés (re-)dresseuses de re-torts;)
Fallait oser le comparatif mais ça passe tout seul, j’adore ! C’est ça !!!
Oser affirmer qui je suis et comment je fonctionne ! Un préalable : bien se connaitre et là le vrai coaching est un accélérateur pour faire connaissance avec soi.
Merci Xavier! Tu sais bien que je ne suis pas à une comparaison hasardeuse près, du moment qu’elle nous pousse à réfléchir et à nous questionner pour aller vers davantage de réussite dans les actions que nous menons;)
Je suis d’accord sur le fait que la connaissance de soi est un préalable indispensable à l’affirmation de soi, en gros sans elle, il n’y a pas grand chose à affirmer, juste de l’égo qui crie famine! Ensuite, le coaching est l’une des méthodes à la disposition de chacun pour aller explorer les recoins de lui-même, il y en a d’autres…