Le jour de la distribution de l’intuition relationnelle, nous sommes nombreux qui n’avions probablement pas reçu l’invitation et avons du mal à distinguer une véritable opportunité relationnelle (qu’elle soit professionnelle ou affective) d’une merveilleuse occasion de rejouer la valse à trois temps du triangle de Karpman. Pour chacun, un seul mot d’ordre, venu d’outre-atlantique, pour préserver un certain bien-être relationnel, protège tes fesses!
Protège tes fesses
Je tiens cette expression Ô combien imagée, et dont les déploiement possibles me font irrésistiblement penser à une sémantique toute Frédéric-Dardienne, de Sandrine, croisée lors d’un Twitpéro à La Défense. Sandrine est directrice de La source humaine, recruteuse sourcière qui, selon ses propres termes, “défriche le sol québécois depuis plus de 15 ans pour y faire jaillir sa ressource la plus précieuse : les gens.
Et je vous propose de la garder bien en tête quant à nos relations. Car les écueils et échecs relationnels, qu’il s’agisse de liens affectifs ou professionnels, sont souvent une douche froide pour l’estime de soi et nourrissent davantage la méfiance et le repli sur soi que l’envie d’accueillir à bras ouverts chaque inconnu qui passe.
Mettre en place un système de protection pour se préserver nos rondeurs délicates d’éventuelles relations pourries ne peut en garantir l’absence totale, mais c’est un bon moyen:
– De minimiser leur fréquence et leur ampleur
– De repérer celles qui ne demandent qu’à dégénérer avant qu’il ne soit trop tard (et donc d’agir)
– De diminuer ses propres chances d’être à l’origine d’un fiasco relationnel majeur qui risque de laisser des traces. (Et oui. Vous et moi sommes à l’évidence des gens merveilleux, mais ils nous arrive aussi d’être l’abruti d’autrui).
1- Poser les critères de la relation
Pour soi-même, afin de déterminer quel cercle correspond le mieux, à un moment donné, à chacune de nos nouvelles rencontres, voire à ceux que nous connaissons déjà, y compris depuis longtemps. Ces cercles sont en permanente évolution, et mettre un individu dans le mauvais cercle peut rapidement générer de l’inconfort relationnel et pas mal de déceptions.
Il va donc s’agir de définir vos différents cercles d’une part, et les critères pour y rentrer d’autre part, de façon à maintenir une distance relationnelle, ou au contraire autoriser une proximité relationnelles adéquates. Les cercles relationnels ont été modélisés de différentes manières, mais faisons simple:
– Les intimes
– Les proches (pas intimes)
– Les copains
– Les relations de travail
– Les connaissances
– Les inconnus
Une fois que vous aurez défini précisément les caractéristiques de chacun, vous serez en mesure d’évaluer chacune de vos relations et de vérifier qu’elle est dans la case qui lui convient. Et d’opérer un bon vieux nettoyage de printemps si nécessaire.
2- Revoir ses attentes et voir celles des autres
Certaines de nos relations sont parfois sources de bien de déceptions, qui sont étroitement liées à nos attentes. Or, les convictions et les principes moraux qui sous-tendent ces attentes ne correspondent à aucune vérité universelle, et nos principes ne valent pas plus que ceux des autres et inversement.
Du coup, autant laisser à l’autre le droit à ses valeurs, et appliquer les nôtre comme un code de conduite interne qui nous concerne nous-même mais n’est pas exigible d’autrui, sous peine de nous transformer en vilain persécuteur. Avec une exception de taille: ce qui constitue une menace à notre intégrité morale ou physique. Là aussi, pas de vérité universelle, à chacun de définir ses limites. De même, minimiser ses attentes est un moyen de se prémunir contre l’effet loft.
Inversement, observer la façon dont s’exprime les valeurs et principes moraux des autres, de façon à déterminer s’ils correspondent à nos critères relationnels, ou pas. En particulier lorsque l’autre a beaucoup d’exigences. La grande tradition du fais-ce-que-je-dis-pas-ce-que-je-fais est l’un des premiers facteurs de fatigue relationnelle, aussi ne pas hésiter à fuir la relation lorsque le bon docteur Jekill se transforme en Mr Hyde dès qu’on n’agit pas exactement comme il le souhaite. Certains sont ravis d’avoir l’opportunité de nous mettre à leur main et ceux-là ne sont pas vraiment dans le respect de l’autre, même – et surtout – s’ils cherchent à vous convaincre que c’est pour votre bien. Ca ressemble alors à de la manipulation.
3- S’affirmer
Le meilleur moyen de se protéger de relations qui pourraient devenir toxiques, c’est de s’affirmer. D’affirmer ce que nous voulons, ce que nous aimons/n’aimons pas, nos désirs, nos limites etc, non pas dans le but de convaincre l’autre ou de chercher à obtenir quelque chose, mais dans un but d’authenticité, pour que l’autre sache à quoi s’en tenir sur nous.
Car les non-dits, les propos vagues ou interprétables, les non-demandes sont autant de sources de bombes à retardement déguisés en simples malentendus qui peuvent dégénérer en conflit, pour peu que l’une ou les deux parties ai(en)t un penchant marqué pour l’auto-complaisance.
Tout comme le point suivant (sortir des rôles relationnels) l’affirmation de soi se construit au travers de renforcement de l’estime de soi et de la confiance en soi, ainsi que des compétences relationnelles, pour développer un positionnement dans la relation à la fois sain et serein.
4- Sortir des rôles relationnels
Nous sommes tous inscrits dedans, parfois discrètement, parfois dans les grandes largeurs, avec un objectif inconscient: obtenir de la reconnaissance. Ces rôles – victime, sauveur, persécuteur – s’ils sont d’une banalité confondante, n’en sont pas moins responsables d’une grande partie de la toxicité de certaines relations, parce qu’ils ont une influence majeurs sur nos comportements et notre façon de communiquer.
Sortir de ces rôles et adopter d’autres comportements est un processus long, parfois difficile en termes d’acceptation de soi et qui nécessite une bonne dose d’auto-bienveillance pour ne pas sombrer dans la dévalorisation chronique à chaque fois qu’on se chope soi-même en flagrant délit de calimérage (substantif: pour “faire son Caliméro”, issu du bas-Saxon cali-mether, “appeler sa mère en pleurant”), par exemple.
Sortir des rôles nous permet de diminuer de façon spectaculaire les rôles inverses que les autres jouent avec nous, et donc de construire des relations dénuées de jeux de pouvoir et inversement davantage d’égal à égal, d’adulte à adulte, bref, plus nourrissantes et agréables. Voir l’ebook gratuit Triangle de Karpman, sortir des rôles relationnels.
5- Sortir du troupeau
Ou plutôt sortir de comportements de troupeau. Qu’il s’agisse d’une communauté sur Twitter, d’une association, d’une entreprise, ou même d’une famille, tous les groupes peuvent finir par rejouer gaiement les rôles relationnels au sens collectif: l’instinct de troupeau. Et encore plus lorsque ce groupe est un peu fermé et qu’il comprend des enjeux. Privilèges, racontars, bouc-émissaires, avec un seul objectif: être le plus beau du troupeau pour les petits chefs, être au chaud du troupeau pour les suiveurs.
Ces petits jeux malsains, nous y participons tous plus ou moins, et mieux vaut nous protéger les miches, car nous finissons tous un jour par en faire les frais, pour peu que nous y ayons un peu trop cédé. Se méfier du troupeau, donc, en gardant tous ses sens en alerte pour :
– Les rôles qui se jouent entre les membres, de façon à repérer les conflits naissants, qu’ils soient d’intérêt ou de personnalité et agir en fonction.
– Eviter les raconteurs de racontars et lorsqu’on vous rapporte un propos sur autrui, demandez-vous quel intérêt le rapporteur a-t-il à vous affranchir de ses soi-disant secrets.
– Eviter de colporter bruits de couloirs et ragots, et lorsque l’envie vous saisit, vous questionner sur vos propres motivations à le faire. Elles ont rarement une blancheur innocente et virginale de colombe de la paix. Voir: les dessous de la médisance
– Garder une distance de sécurité avec les groupes qui fonctionnent à l’excès en circuit fermé, pour éviter que l’implication ne finisse en noyade.
6- Double truc en plus: apprendre de ses expériences + un exemple
Nous protégeons un peu mieux nos fesses chaque fois que nous profitons d’une expérience relationnelle pour en apprendre quelque chose:
- Identifier ce qui constitue des relations réjouissantes, en termes de traits de personnalité, de comportements, de valeurs, de positionnement dans la relation.
- Mettre les écueils relationnels au service du renforcement de notre positionnement dans la relation en les explorant grâce à la lecture émotionnelle pour identifier les besoins non comblés qui se sont exprimés dans le désaccord ou le conflit. Combler ces besoins permet de diminuer la fréquence de ces situations.
C’est comme ça qu’un de mes clients – appelons-le Philippe – a pris conscience d’un de ses besoins relationnels, qu’il n’aurait pas imaginé au départ, car il ne manque ni de tempérament ni d’assertivité. Il s’est rendu compte que ses accrochages réguliers venaient d’un manque de clarté sur ses attentes lorsqu’il était à l’initiative d’un projet, qu’il confondait avec l’idée de laisser à chacun un espace pour s’exprimer. Du coup, les parties prenantes se croyant libres d’en faire ce qu’elles voulaient, se l’appropriaient d’une manière qui le privait de sa propre liberté de mener le projet comme elle l’entendait. Et lorsqu’il s’est retrouvé confronté à un collègue qui s’est révélé être un égo craintif à tendance contrôlante, version victime-persécuteur, qui a voulu prendre le dessus dans la gestion du dossier à coups de petites techniques manipulatoires, Philippe s’est senti piégé, dépossédé et très en colère. Le clash était inévitable.
Philippe a pu comprendre ses besoins mal comblés au travers de sa réaction émotionnelle et en particulier à son état de défense: une profonde angoisse associée à une forte agitation interne, typiques de la réaction de fuite qui indique un double besoin de sécurité et de liberté (voir: remparts coursives et échauguettes: les états de défense aux émotions). La sécurisation de son projet et le fait de pouvoir le mener librement passaient par un positionnement beaucoup plus fort et beaucoup plus clair vis à vis de ses projets en question et de ses partenaires.
Il a donc pris sa part de responsabilité dans le conflit et en a tiré un biais d’amélioration dans ses relations. Ce qui est bien plus utile que d’aller chercher la paille dans l’oeil du voisin, parce que cette paille-là on ne peut rien en faire. Tout le monde en a tiré un bénéfice puisque ses partenaires ont pu mieux comprendre ses attentes et choisir d’y répondre en toute connaissance de cause, ou au contraire d’aller travailler sur d’autres missions qui leur convenaient mieux. Et tout le monde peut un peu mieux protéger ses fesses;)
Alors, cher lecteur, chère lectrice: PTF!
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Merci Sylvaine 🙂 Je ne pensais pas que cela t’avait marqué au point de t’en souvenir quelques années plus tard…
Et merci pour l’article. Le numéro 2 m’interpelle particulièrement, au plaisir d’échanger à ce sujet 🙂
Bonjour Sandrine! Ravie de te croiser! En fait, j’avais écrit ce billet pas si longtemps après cette mémorable rencontre!
Et pour l’échange, se sera avec grand plaisir!