Si le recrutement ne se virtualise pas tant que ça, la cooptation a de beaux jours devant elle et les média sociaux sont un moyen formidable de développer son réseau professionnel et de se faire recommander. A condition d’en connaître les codes et de comprendre qu’il s’agit avant tout de tisser des liens. Il devient de plus en plus indispensable de développer ses compétences relationnelles.
La cooptation se virtualise
Toutes les études en témoignent, le recrutement via les réseaux sociaux peine à sortir de l’anecdotique et même s’ils modifient et enrichissent les vecteurs de la recherche d’emploi, ils ne l’ont sûrement pas révolutionnée.
En revanche, les médias sociaux méritent une attention toute particulière en recherche d’emploi. Car la cooptation prend de l’ampleur et s’étend au virtuel. Comme en témoigne cette étude de l’Apec: 39% des entreprises l’utilisent. La recommandation devient d’ailleurs cruciale à mesure que le salarié avance dans sa carrière :
“la part des candidats connus ou recommandés parmi les candidats recrutés croît avec l’âge de ces derniers. Ainsi, près de la moitié des candidats âgés de plus de 50 ans et recrutés en 2011 étaient connus de l’entreprise et/ou recommandés par une personne extérieure”
D’autre part, comme le souligne ce billet de TalentPlug, la cooptation par le réseau donne accès au “marché caché”, ce marché de l’emploi qui ne fait pas toujours l’objet d’annonces largement diffusées sur les sites emploi. Appréciée des entreprises, la cooptation coûte moins cher qu’un recrutement classique et semble garantir de meilleures adéquations entre candidat et employeur, comme le résume cette infographie:
Le développement de son réseau professionnel et la cooptation sont des moyens particulièrement intéressants pour tous ceux dont la situation n’aide pas l’employabilité:
- Les personnes aux parcours atypiques
- Les personnes en seconde partie de carrière et les seniors
- Les personnes qui ont mené une reconversion professionnelle et sont de retour à l’emploi
Parce que le réseau se virtualise, les liens noués sur les réseaux sociaux (et pas uniquement les réseaux professionnels comme LinkedIn ou Viadeo) deviennent autant de sources d’opportunités et de cooptation. Et cela a quatre conséquences à prendre en compte:
- L’écart se creuse entre les candidats connectés et peu connectés
- L’écart se creuse entre ceux qui savent réseauter sur Internet et ceux qui réseautent “à la papa”
- Les réseaux sociaux sont une mine d’or pour tous ceux qui estiment avoir un réseau professionnel limité et veulent le développer.
Parce que le développement d’un réseau sur les médias sociaux n’a pas grand chose à voir avec celui qui se fait dans la vraie vie, les compétences relationnelles deviennent indispensables pour les chercheurs d’emploi qui voudraient mettre toutes les chances de leur côté.
Cooptation virtuelle et compétences relationnelles
Le fait que la cooptation se déplace de l’IRL (la vraie vie) au virtuel est certainement une bonne nouvelle, car, pour peu qu’on soigne ses compétences relationnelles, il est beaucoup plus facile de se construire un réseau professionnel via Internet que dans la vraie vie, en particulier parce qu’on a la possibilité de venir y nouer des liens simplement, en parlant métier, et non pas se mettre dans l’inconfortable position du demandeur, ou de faire du push de cartes de visites dans des “soirées réseau” ou ceux qui se connaissent parlent entre eux et où l’on peine parfois à entrer en conversation.
La leçon à en retirer, c’est principalement de redonner aux médias sociaux leur véritable rôle, que la traduction version calque – et erronée – des adeptes du Globish rend un peu confus: ce ne sont pas des plateformes sociales, ce sont des plateformes relationnelles. Mais attention, s’il est essentiel d’y faire du relationnel, il s’agit bien de relationnel au sens noble du terme. C’est à dire être là pour y développer autre chose que des accointances vagues et utilitaires, mais bien pour entrer en relation et s’intéresser aux gens AVANT d’espérer qu’ils s’intéressent à vous en retour. Et ces liens se font autour d’un sentiment d’appréciation mutuel, d’affinités qui vont favoriser le partage d’opportunités.
Il s’agit donc de s’exposer au travers non seulement de son expertise et de ses compétences métiers, mais aussi au travers de sa personnalité et de sa façon d’être en relation, pour une raison très simple: on coopte une personne qu’on connaît, dont on reconnaît les mérites professionnels, bien entendu, mais aussi et surtout une personne qu’on apprécie.
Ceux qu’on mésestime ou dont on ignore la véritable personnalité parce qu’ils restent en retrait derrière leurs compétences professionnelles, personne ne prend le risque de les recommander, parce que c’est toute la crédibilité du coopteur qui est en jeu. Ainsi dans cet article, le site Guichets-RH traite des recommandations sur des réseaux comme LinkedIn:
“Témoigner publiquement en faveur d’autrui est un acte très impliquant, l’auteur du témoignage s’engage personnellement dans ses propos. On ne recommande pas n’importe qui !”
D’une pierre trois coups!
Il y a une autre bonne nouvelle à la virtualisation de la cooptation. Le fait que le travail relationnel devienne incontournable est tout bénéfice pour le chercheur d’emploi, car les compétences relationnelles représentent une part non négligeables des compétences informelles (soft skills) qui sont en passe de devenir le point d’orgue de l’employabilité.
D’autre part, les compétences relationnelles ne sont pas des recettes figées et formatées qu’on peut trouver dans un livre. Elles passent par un renforcement de la connaissance de soi, de la confiance en soi, et ont deux conséquences directes:
- Le développement de l’assurance, cruciale dans les entretiens d’embauche.
- La construction d’une posture relationnelle forte, qui facilite l’intégration, favorise le bien-être dans son nouveau poste et la collaboration.
Les réseaux sociaux deviennent alors un terrain d’entraînement de choix pour tester notre façon d’être en relation en fonction de ce qu’elle suscite comme comportements en retour. Et d’en tirer des enseignements sur les points à renforcer pour créer un réseau solide, générateur à son tour de confiance en soi. Celle-ci permettra une authenticité sereine et évitera les erreurs relationnelles liées soit au triangle de Karpman, dans lequel nous sommes tous inscrits, soit à la méconnaissance des codes et qui sont légions sur les média sociaux, comme par exemple:
- Le relationnel poudre aux yeux: version je-te-pommade-par-ci-je-te-pommade-par-là inscrit dans le cadre d’une fausse gentillesse qui navigue entre individualisme patenté qui soigne son intérêt personnel et manipulation pure et simple. Et cela finit immanquablement par se faire remarquer.
- La victime qui crie famine: la recherche d’emploi est une période particulièrement difficile et en même temps, s’étaler en jérémiades quémandeuses ou se plaindre en rond avec d’autres malheureux ne donne pas envie de vous aider.
- Les maladresses: les messages maladroits du type “vous voulez bien transmettre mon profil à votre carnet d’adresse” ou encore les demandes directes d’opportunités faites aux DRH présents sur les réseaux
Construire cette posture virtuelle favorable au tissage de relations professionnelles nouvelles solides et génératrices d’opportunités se fait au travers:
Du renforcement de la relation à soi et de la relation aux autres:
- Confiance et assurance, les clés de la recherche d’emploi
- Renforcer son authenticité
- Leadership de soi: préalable au leadership tout court
De stratégies d’exposition professionnelles:
- Cibler ses pairs plutôt que les recruteurs
- Raconter une histoire – son histoire
- Identité professionnelle et connaissance de soi
Et l’on acquiert au passage une posture pleine d’une assurance qui ne la ramène pas, proche d’un charisme qui donne envie aux professionnels avec qui nous tissons de véritables liens de nous coopter. La boucle est bouclée!
Voir aussi
Triangle de Karpman et recherche d’emploi
Réseaux sociaux: conseils pour les chercheurs d’emploi
3 astuces relationnelles pour bien commencer sur les réseaux sociaux
Recherche d’emploi: reconstruire la confiance et l’estime de soi
Le non guide de la rechercher d’emploi sur Internet: les réseaux sociaux
Aller plus loinPour élaborer vos stratégies de recherche d’emploi sur Internet ou pour renforcer votre confiance en vous, pensez au coaching. Pour tous renseignements, contactez Sylvaine Pascual 01 39 54 77 32 |
En effet, la fracture numérique peut se révéler un frein supplémentaire à l’égalité des chances. Pour la cooptation (réelle ou virtuelle) je m’en suis toujours méfié (à tord ou à raison), car une fois l’embauche consommée, si ça se passe mal, quid des relations entre le “parrain” et son supérieur hiérarchique?
Bonjour Sylvaine, merci pour ce billet.
Je partage ton argument d’une facture nouvelle liée au non-usage de ces nouveaux outils.
Mais cette nouvelle inégalité face aux usages n’est-elle pas également compensée par une plus grande “démocratisation” (même si le terme est mal choisi), des réseaux de relations, qui restent encore l’attribut de filières de formation élitiste avec des “tickets d’entrée” très chers et des règles implicites fortes ?
Salut Franck, ça me fait plaisir de t’accueillir sur mes rivages odysséens;)
Pour répondre à ta question: certainement, elle pourrait l’être, et c’est aussi pour cela qu’il est de la responsabilité des connectés d’être pédagogues des nouveaux usages plutôt que vecteurs de nouveaux codes réservés à des groupes d’affranchis qui réinventent l’instinct de troupeaux en se congratulant mutuellement!
Bon, j’y vais un peu fort, cependant je suis assez perplexe devant la vitesse à laquelle les connectés génèrent de nouveaux codes auxquels ils devient de plus en plus difficile d’accéder pour les non connectés. Alors qu’à l’inverse, moi qui ait longtemps eu des freins et difficultés à réseauter communes à beaucoup de gens, je suis la première à vanter les mérites des réseaux sociaux tant l’entrée en relation y est faisable. Encore faut-il être à même d’identifier les usages et de se les approprier, ce qui devient de plus en plus difficile à mesure que les communautés se ferment sur elles-mêmes (l’égo a encore frappé!)