Le travail devrait-il rester le dur labeur hérité de la Genèse? Non, nous ne sommes pas condamnés à être les héritiers infortunés d’un Adam coupable, payant nos fautes virtuelles par l’intermédiaire d’un job pourri, courbant une échine soumise à la morosité ambiante. Le plaisir au travail existe, et puisque les entreprises peinent encore à le favoriser, il est une réalité à inventer autant sur le plan individuel que collectif, en commençant par résister à la morosité ambiante.
Le droit au plaisir de travailler
Entre concept vite estampillé gentillet et héritage judéo-chrétien, le plaisir au travail peine à trouver ses lettres de noblesse, autant en termes de faisabilité qu’en termes de légitimité. C’est vrai, quoi, on n’est pas là pour rigoler! Peut-être, cependant faire ce qu’on a à faire dans la bonne humeur et le plaisir, c’est quand même plus motivant que le faire dans la sueur et les larmes. Et puis le plaisir au travail, c’est bien autre chose que de multiplier les récrés! D’ailleurs, les articles et dossiers sur les bénéfices du plaisir au travail se multiplient, avec un point commun: ses bénéfices sont immenses… en particulier pour les entreprises.
Revendiquons donc le droit à ne pas gagner notre pain à la sueur de notre front, mais plutôt à la satisfaction de nos tripes: comme nous l’entendons, en fonction de nos besoins, de nos aspirations, sans être bridés par les idées reçues, championnes de la morosité, de la “prudence” immobiliste distribuées généreusement et qui tirent à hue et à dia autant sur les envies d’évolution professionnelle que les désirs d’entreprendre.
La balle du plaisir au travail dans notre camp
S’il est exact que la situation dans certaines entreprises, ou dans certains départements à l’intérieur de certaines entreprises est potentiellement invivable, il y a peu de situations qui ne soient pas un poil bonnifiables, que ce soit par des changements dans notre façon de travailler, dans notre façon d’être en relation avec nos collègues ou notre hiérarchie, ou par une transition de carrière.
Et puisque pisse-vinaigres et fâcheux continuent de s’unir sans mollir pour nous distiller des un-tien-vaut-mieux-que-deux-tu-l’auras ou on-n’est-pas-au-pays-des-bisounours, les deux grands succès du hit-parade des conseils frisquets; puisqu’ils voudraient nous faire croire que mieux vaut souffrir et avoir un job qu’être au chômage, sans ouvrir le champ aux possibilités d’améliorations possibles pour travailler dans un intermédiaire agréable entre ces deux excès inacceptables; la balle du plaisir au travail est dans notre camp, nous, salariés ou entrepreneurs, aussi résistons à la morosité ambiante.
- En œuvrant par tous les moyens à notre disposition pour améliorer notre quotidien au travail, minimiser au maximum des aspects déplaisants et laisser davantage d’espace à ses côtés agréables. Voir: Job crafting: devenir l’artisan de son propre plaisir au travail
- En savourant gaiement tous les instants de plaisir que nous pouvons y trouver, pour nous-mêmes et pour entretenir une relation plus positive à notre quotidien professionnel. Voir 10 petites choses qui mettent de bonne humeur au travail
- En partageant largement, avec nos proches, nos collègues, notre entourage, toutes les dimensions de notre satisfaction professionnelle, histoire de montrer que ce plaisir ne tient pas du coup de bol, mais bien de choix et d’actions menées… ça pourrait les convaincre qu’ils ont aussi une marge de manœuvre dans leur vie professionnelle et leur donner envie de se remonter les manches à leur tour.
La morosité comme modèle de pensée unique?
” A l’heure où nous ne cessons de dénoncer les dérives managériales et les conduites cyniques parfois cultivées par certains salariés, l’épanouissement au travail devrait devenir un gros mot ? Ceux qui sont heureux dans leur job devraient culpabiliser et taire leur plaisir ? Et encore afficher une mine renfrognée pour que surtout personne ne s’aperçoive qu’ils s’accomplissent vraiment dans leur rôle ?“
Voilà l’interrogation de Patrick Bouvard et Caroline Guichet dans cet article intitulé Oui, nous pouvons travailler avec plaisir, publié sur RH Info. Et leur réponse est non, en rappelant que si travail vient de “tripalium”, joli instrument de torture, son synonyme est aussi “œuvrer”, un sens… qui a du sens. Et de démontrer que “la performance collective ne peut s’effectuer durablement qu’en passant par la réussite individuelle de chaque acteur”, au travers d’exemples aussi parlants que limpides. A lire absolument, pour se convaincre une fois pour toutes que “les salariés heureux sont le sésame de nos entreprises“.
La morosité comme levier infaillible de déplaisir au travail
Mars-lab de son côté s’est penché sur les ingrédients nécessaires pour réussir son propre malheur au travail, ce qui, finalement, n’est pas très très compliqué, dans ce billet intitulé Faire son propre malheur au travail, mode d’emploi. En préambule:
“A partir des schémas préétablis du pessimisme ambiant et chronique, suivez attentivement les instructions ci-après pour ne pas sortir du déterminisme de l’auto-prophétie réalisatrice négative qui vous permettra à coup sûr de faire votre propre malheur au travail, et pourquoi pas celui d’autrui, quelle que soit votre position hiérarchique et votre emploi. Avant la lecture de ce mode d’emploi, prenez la précaution de ne jamais remettre en cause le stéréotype qu’avant c’était rudement mieux, restez persuadé que l’avenir sera à coup sûr complètement noir et qu’on ne peut rien y faire, parce que c’est la faute à la crise, d’ailleurs la preuve, nos politiciens si brillants ne parviennent eux non plus à rien. “
Drôle et incisif, cet article a l’immense mérite de nous remettre face à notre propre immobilisme, à notre propre soumission volontaire aux idées reçues, en mode léger, histoire de ne pas culpabiliser encore davantage.
La morosité n’est ni universelle, ni obligatoire!
Les discours récurrents sur le chômage, la crise, le burnout, le harcèlement, tous les petits et grands sujets qui tournent autour de ce qui va mal et leur pendant: ce qui pourrait aller bien mais dont il convient de se méfier, pour ne pas risquer l’échec et son inévitable descente aux enfers (les transitions professionnelles en général, changer de job ou de métier en particulier), tout nous pousse à croire que tout va mal. Encouragés à focaliser sur le négatif, le dangereux, le difficile, nous en venons à éviter toute prise de risque d’une part, et à générer des zones aveugles sur ce qui va bien d’autre part.
Et pourtant, nous sommes nombreux à aimer notre boulot, à l’exercer avec un plaisir qui devrait être non dissimulé et qui ne devrait pas être attribué à “la chance”, mais bien au boulot fourni par ceux qui se sont construit une vie professionnelle sympa. Ce qui donnerait aux autres, englués dans la morosité, des preuves qu’au fond, il est possible de se faire plaisir au travail.
A ce titre, cet article de Pierre Couleur, intitulé Du plaisir au travail est doublement intéressant: coup de gueule contre les discours pessimistes et témoignage d’un vie professionnelle teintée d’un plaisir auto-alimenté par la créativité, c’est à dire d’un plaisir produit plutôt qu’induit dont il est l’heureux responsable:
“Dès que j’ai pris mes fonctions j’ai cherché à améliorer ce qui me semblait pouvoir l’être. A contrario, j’entends souvent quelques uns de mes collaborateurs se plaindre de ce qui manque, de ce qui ne fonctionne pas parfaitement, de ce qu’il faudrait changer… mais se limitent à ce constat. Ils posent leur paquet de récriminations, crachottent leur mauvaise humeur… et continuent leur job sans chercher à changer les choses. Attentistes. Personne n’étant à leur service, la situation qu’ils estiment insatisfaisante a peu de chances d’évoluer rapidement et ils pourront indéfiniment continuer à s’en plaindre.”
Sortir de la morosité et construire votre plaisir au travail
Voici quelques ressources pour vous mettre à œuvrer activement, avec joie et détermination, à (re)construire votre plaisir au travail:
Job crafting: devenir l’atisan de son propre plaisir au travail
(Re)donner du sens à nos métiers
Cultiver l’émerveillement au travail
Job idéal: les 7 ingrédients du plaisir au travail
10 trucs pour augmenter le plaisir au travail et moins procrastiner
Des solutions simples pour améliorer son quotidien professionnel
Les 3 ingrédients d’une bonne journée au travail
Déterminer s’il est temps de changer de boulot en 6 étapes
Les talents naturels, passeport pour le plaisir au travail
Job idéal et vitamines mentales
Aller plus loin
Vous voulez retrouver du plaisir au travail, dans votre job actuel ou au travers d’une transition de carrière? Pensez au coaching. Pour tous renseignements, contactez Sylvaine Pascual au 01 39 54 77 32
Le dernier paragraphe est particulièrement vrai. Le moteur du pessimisme est l’immobilisme. Je ne vais pas affiremer que mon exemple est universel mais voici quelques chiffres car j’aime les données factuelles. Je suis entré au service de ma société il y a 7 ans et je démarre le mois prochain mon 3e poste différent (pourtant dans la même équipe – mon usine empoie +1000 personnes sur site et mon groupe est international HORS AUTOMOBILE 🙂 ). En 7 ans, mon évaluation annuelle est montée de 3.8/5 à 4.82/5. J’ai eu la chance de mettre en oeuvre des outils qui n’existaient pas, toutes les données étaient sur notre nez mais personne n’en faisait rien. Ces outils sont désormais les principaux indicateurs de mon usine. J’aide au developpement de nos applications internet, je conseille des collègues à l’étranger. Mon salaire a été augmenté en 7 ans de 900€ NET mensue (+30%), je suis passé cadre et le pompon, je vais finalement occuper le poste que j’ai imaginé et pour lequel j’ai milité pendant 2 ans ! Un attentiste, sur la même période n’aurait gagné “que” 10% de mieux en 7 ans grace à l’inflation en supposant que son entreprise suive ce système d’augmentation de salaire.
Cela ne se fait bien sur pas tout seul, il y a des jours avec et des jours sans, même des jours où je voudrais consulter Itaque pour une reconversion. Mais au final, quand je prends un peu de hauteur et relève le nez du guidon : MAMA MIA ! qu’est ce que je m’éclate !
A coté de ça, j’ai ces fameux collègues qui geignent et qui attendent. Le pire est que ce cycle est entretenu de lui même car plus ils se plaignent en attendant, plus les gens dynamiques passent devant, font des outils, obtiennent des postes, des augmentations, de la reconnaissance … Mais au lieu de changer de méthode, il réfère penser qu’ils sont victime d’un favoritisme éhonté.
Réfléchissons un peu: sur quoi un patron se base t il pour faire évoluer son activité ? sur un gars qui attend contrat et salaireavant lever le petit doigt ou sur le pauvre idiot qui donne 2 heures de plus chaque jour sans rien demander à personne et qui démontre que ça marche ? Le négatifs diront: mais si ça marche, le patron aura eu une amélioration sans t payer; Je dis NON. Un patron sait qu’une ressource dynamique et volontaire doit être entretenue pour être conservée. Un gars qui a eu une bonne idée un jour,en aura d’autres plus tard, et ça vaut un peu d’argent mais je préfère payer un peu plus que de potentiellement l’avoir contre moi chez un concurrent. Un gars qui ne fait QUE ce qu’on lui demande est une ressource qui n’apporte aucune valeur ajoutée.
Réfléchir en terme de solutions et non en terme de problème esr l’une des clés qui permet de démarrer ce formidable véhicule qu’est “L’éclatotaf”. Et ce véhicule magique rapporte gros, pour son estime de soi, pour son salaire et diminue le volume de la sonnerie nécessaire au réveil pour vous sortir du lit. Un véhicule qui ne coute rien, ne pollue pas, qui vous fait avancer de plus en plus vite pour un modique état d’esprit à acquérir.
Merci Cédric pour ce témoignage:)
Tellement vrai, on est pas obligé de se faire chier pour bien travailler. Cet état d’esprit a l’air quand même très franco français :-/ si on pouvais en sortir !! C”est vrai que dans ma famille le travail a toujours été vu comme un sacerdoce.
Finalement, et si la dopamine c’était le meilleur outil du manager 🙂
Franco-français, je ne suis pas certaine… mes expériences à l’étranger me poussent plutôt à croire que dans certains pays occidentaux, on est bien programmés pour subir sans mot dire, ce qui n’est pas beaucoup mieux!
Cependant oui, dopons-nous à la dopamine! Ne serait-ce que pour passer du “je ne vais pas bien et ça me fait râler” à “j’oeuvre pour aller mieux”!
Passer du “je ne vais pas bien et ça me fait râler” à “j’oeuvre pour aller mieux” –> je vais en parler à certains collegues, ça leur fera du bien 😉