Critiquer l’absence de politesse ou d’amabilité des autres est un sport intemporel, certes, mais consommateur d’une énergie qui pourrait être consacrée à des choses plus utiles… Attelons-nous à en faire nous-mêmes davantage preuve, pour en tirer des bénéfices immédiats et lancer la machine. Parce que vivre mieux ensemble, c’est bon pour le plaisir au travail.
La politesse n’en finit pas de se perdre
Nous sommes constamment en contact avec nos contemporains, par choix ou non et un minimum de considération mutuelle est nécessaire pour assurer des interactions au mieux agréables et bienveillantes, au pire, acceptables. Or il quoi de plus commun dans les discussions convenues que d’entendre dire que la courtoisie, l’amabilité, la politesse se perdent, et en particulier que “les jeunes d’aujourd’hui sont”… je vous laisse finir la phrase selon votre humeur et votre préjugé personnel.
Je dis préjugé parce qu’il y a 25 ans, on entendait déjà les mêmes discours et à l’époque, les jeunes de ma génération étaient déjà perçus comme mal élevés, des mini barbares irrespectueux, désinvoltes et grossiers, bref, des malappris, des gougnafiers. Et ce n’est pas nouveau puisque Platon, dans La République, fait dire à Socrate:
“le professeur, dans un tel cas, craint ses élèves et les flatte, les élèves n’ont cure de leurs professeurs, pas plus que de tous ceux qui s’occupent d’eux ; et, pour tout dire, les jeunes imitent les anciens et s’opposent violemment à eux en paroles et en actes, tandis que les anciens, s’abaissant au niveau des jeunes, se gavent de bouffonneries et de plaisanteries, imitant les jeunes pour ne pas paraître désagréables et despotiques.“
Bref, il semble que depuis même l’antiquité, la politesse n’en finisse pas de se perdre…
Et c’est relativement compréhensible, si nous attendons que les autres la pratiquent avant de nous y mettre. Car c’est souvent une excuse qui nous dédouane de nos propres manquements en la matière. En d’autre termes, nos belles valeurs, nous les exigeons souvent davantage des autres que de nous-mêmes et drapons nos auto-dérogations dans les voiles pudiques des bonnes excuses du type “je ne vais quand même pas être poli avec cet ostrogoth de Dupont-Durand, vu que ça lui arracherait une prémolaire de dire bonjour”.
Des normes aussi variables que les cours du pétrole
Il faut dire que la définition même de la politesse est très vague et varie en fonction du milieu, de la culture etc. Du coup, comment s’y reconnaître entre courtoisie conventionnelle, manque d’éducation et incivilité flagrante?
La notion de politesse est aussi en constante évolution. Le “bonjour Monsieur/Madame” qu’on exigeait autrefois est aujourd’hui heureusement limité aujourd’hui au “bonjour”. Il n’y a pas si longtemps, l’interruption d’une conversation pour répondre à son portable était considérée comme inadmissible, d’une impolitesse crasse, d’une inconvenance tout à fait cavalière. Pourtant aujourd’hui elle est largement admise, probablement en vertu de la croyance généralisée qu’elle reflète l’ampleur de notre importance (personnellement, elle m’agace, nous avons tous nos limites). De même, les formules de politesse épistolaires ampoulées sont en train de disparaître au profit d’expressions plus légères.
Autre exemple, le merci, incontournable chez nous, apparaît, dans certaines cultures comme une marque de distance et son abandon signifie une relation proche. La politesse n’a donc rien d’universel, ce qui n’en facilite pas l’exigence.
Etre exemplaire de sa propre définition de la politesse
Attention donc à l’excès de principes qui peuvent nous ancrer dans des attentes vis-à-vis des autres, la déception leur sera directement proportionnelle. Attachons-nous plutôt à être l’incarnation de nos propres principes de politesse et d’amabilité. Etre exemplaire de ce qui a de la valeur à nos yeux, c’est aussi être authentique et cohérent, d’une part, et ça suscite des comportements équivalents chez autrui d’autre part.
Pour ma part, je limiterais la politesse à quelques principes simples:
– Dire bonjour à ses proches, au boulot comme à la boulangère, au personnel de nettoyage ou au chauffeur du bus.
– Dire merci pour un service rendu (service au sens le plus large).
– Laisser l’interlocuteur finir sa phrase (pas toujours facile!).
– Tenir la porte à la personne derrière soi.
– Dire s’il te plaît/s’il vous plaît lorsqu’on demande quelque chose.
Et lorsque j’estime exaspérant d’être potentiellement interrompue par le diktat du téléphone portable, je peux toujours avoir recours à la communication non violente ou à la demande assertive pour exprimer mon sentiment à mon interlocuteur.
Et vous? Que considérez-vous comme les principes de politesse essentiels?
Politesse vs amabilité
Et après tout, la question tourne certainement bien plus autour de l’amabilité que de la politesse.Tout simplement parce que lorsqu’on fait preuve d’amabilité, le plus souvent, on se montre poli!
Car je suis souvent surprise de constater certaines attitudes que mes principes moraux étriqués associent à l’incivilité, comme la froideur de certains clients vis à vis des caissières, par exemple, voire même l’ignorance complète. Ou encore les bonjour/merci/au revoir, distants, presque inconscients, sans considération ou prise en compte réelle de l’existence de l’autre. Et pour moi, cette politesse mécanique est peut-être pire que l’absence de politesse, c’est une sorte de négation de l’autre d’autant plus violente qu’elle est sournoise.
Un regard, un sourire, un mot aimable, un merci sincère à la femme de ménage de l’entreprise, au guichetier, à la serveuse, au collaborateur à qui on confie une tâche, au collègue à qui on transmet une information mettent de la chaleur humaine dans de minuscules interactions sociales qui deviennent plus satisfaisantes, voire réjouissantes – donc nourrissantes, et participent à la satisfaction du besoin de reconnaissance et d’appartenance. Entrer dans leur bulle un instant, ou les laisser entrer dans la nôtre, avec un peu de chaleur et de sincérité, c’est une vraie source de vitamines mentales.
D’autre part, l’amabilité attire l’amabilité et inversement, l’incivilité engendre l’incivilité. Demander quelque chose avec le sourire, avec gentillesse a bien plus de chances de nous obtenir les bonnes grâces et une place de choix dans les petits papiers de nos contemporains, et donc de développer la confiance mutuelle et des relations plus solides et plus saines, réduisant au passage les éventuels stress et anxiété sociale. Et tout cela, évidemment, ça nourrit la bonne humeur autant que l’estime de soi.
Bien sûr, il y aura toujours des mauvais coucheurs, des cuistres, des mufles et des butors, et il m’arrive comme probablement tout à chacun d’avoir envie d’expliquer à certaines personnes que leur accueil est aussi agréable que celui de la postière de la chanson. Cependant, céder à la tentation de s’agacer, de s’offusquer et de jouer les reines outragées est bien plus coûteux en énergie que de les gratifier d’un sourire et de passer à autre chose.
Mini coaching: mettre davantage d’amabilité dans votre vie
Si vous avez le sentiment que le monde autour de vous manque d’amabilité, peut-être en manquez-vous vous même, ou peut-être que vos attentes sont trop élevées? Ou encore, peut-être que vous attendez que les autres, cette entité vague sur laquelle nous n’avons aucune prise, s’y mettent pour vous y mettre? Autant attendre la passage des marchands de miracles et il serait assez gonflé d’attendre des autres ce que vous n’être pas prêts à faire.
Souvenez-vous aussi que nous élaborons des systèmes bien huilés pour entretenir nos croyances, aussi si vous êtes convaincu(e) que la politesse se perd, vous avez sans doute tendance à remarquer les signes d’incivilité et à ne pas voir les marques d’amabilité.
Etre à l’initiative de comportements aimables a l’avantage d’apporter des résultats positifs immédiats, de récolter rapidement l’amabilité retour, alors sortez l’Email diamant, et au turbin!
Quels sont les principes de bases de l’amabilité, à vos yeux?
Dans quelle mesure les mettez-vous en pratique?
Dans quelle mesure les mettez-vous en pratique avec chaleur et sincérité?
Comment vous y prendre pour être davantage exemplaire de ces principes?
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Encore un billet de haut vol ! Sylvaine, vous êtes épatante et je vous imagine en chroniqueuse sur les ondes nationales, ce serait un très bon moment de radio. En attendant ce jour je profite égoïstement de vos propos.
Merci pour cet article de très grande qualité.
Je ne sais pas si la politesse, ou l’amabilité, voire la gentilesse, se perdent. On y est effectivement moins sensible (on ne remarque plus forcément leur expression simple), donc on remarque d’autant plus leurs absence. Mais comme tu le fais si justement remarqué, on s’enferme dans un système qui entretient nos croyances, nos préjugés. Merci d’ailleurs pour cette seule remarque.
D’un autre coté, entre les urgences et les obligations du quotidien, la course dans les transports (oui, je suis parisien !), une mauvais journée, on peut soi même oublier ces quelques principes de base. Raison de plus pour être indulgent lorsqu’on ne nous montre pas les marques de politesse auquelles on estime avoir droit.
J’essaie autant que possible de faire preuve de politesse et, même plus, d’amabilité, comme tu le dis si bien. En y ajoutant une marque de gentillesse, d’humanité : ajouter un sourire, regarder la personne dans les yeux, lui prêter un minimum d’attention.
Pour te paraphraser, cela rajoute de la chaleur et de l’estime de soi.
Encore merci pour ce très bel article !
Même avis sur la politesse :
Les constats :
– Nous attendons que les autres la pratiquent avant de nous y mettre. Car c’est souvent une excuse qui nous dédouane de nos propres manquements en la matière…
– souvent surprise de constater certaines attitudes que mes principes moraux étriqués associent à l’incivilité, comme la froideur de certains clients vis à vis des caissières, par exemple, voire même l’ignorance complète, les bonjour/merci/aurevoir, distants, presques inconscients, sans considération ou prise en compte réelle de l’existence de l’autre. Et pour moi, cette politesse mécanique est peut-être pire que l’absence de politesse, c’est une sorte denégation de l’autre d’autant plus violente qu’elle est sournoise.
Les actions :
– Dire bonjour
– Dire merci
– Laisser l’interlocuteur finir sa phrase
– Tenir la porte
– S’il te plâit/s’il vous plaît lorsqu’on demande quelque chose
– Un regard, un sourire, un mot aimable, un merci sincère
# l’amabilité attire l’amabilité, et inversement, l’incivilité engendre l’incivilité.
# Demander quelque chose avec le sourire, avec gentillesse a bien plus de chances de nous obtenir les bonnes grâces et une place de choix dans les petits papiers de nos contemporains, et donc de développer la confiance mutuelle et des relations plus solides et plus saines, réduisant au passage les éventuels stress et anxiété sociale.
!! Extrait de “La vie est une rivière, dépassons les barrages !” :
On souhaite touts le bonheur à ses proches, à ses enfants. La meilleure manière de leur apprendre ce bonheur, c?est d?être heureux soi-même. Au-delà du droit au bonheur existe le devoir du bonheur. Nous pouvons montrer la route à ceux qui la cherchent. En nous changeant nous-même, nous faisons le meilleur travail que l?on puisse faire pour aider les autres.
[Paul Dewandre]
Ces articles sont très intéressants et très bien écrits.
Bonne chance dans tous vos projets…
🙂
Merci^^
Dans le judo, la politesse vient en premier : La politesse est le respect d’autrui
Sans Respect aucune confiance ne peut naitre…
En tous les cas, bravo pour les thèmes développés et vos contenus qui reflètent un état d’être bienveillant et efficace
Merci! Pour le retour et pour le partage martial;)