Parce qu’être raisonnable a ses limites et qu’il existe d’autres façons de faire, voici un moyen simple et léger comme une brise d’été de s’autoriser à sortir des normes, se libérer du qu’en dira-t-on, de la crainte du jugement et à oser faire ce qui nous tient à cœur… à notre manière.
Etre raisonnable: l’injonction qui sent le rance
Je suis tombée sur un billet sur le blog de Manon Blondin qui m’a inspirée. Elle y cite Clint Eastwood “J’ai essayé d’être raisonnable et je n’ai pas aimé”. Ca m’a plu, tant le terme m’accable et me consterne, tant je le trouve décourageant et démoralisant… Etre raisonnable, voilà une expression qui sent le rance des injonctions d’antan, celles de l’enfance où c’est plus simple de brider les impulsions et l’imagination que de laisser la créativité s’exprimer.
Etre raisonnable a aussi les relents de naphtaline des choix d’adulte, des vies rangées, proprettes, convenables, ordonnées, maîtrisées, où on est pas là pour rigoler. Etre raisonnable, c’est aussi, littéralement, être celui qu’on peut raisonner et par extension influencer, façonner, soumettre. Ou encore l’odeur amère du renoncement, du devoir, de la capitulation. C’est encore la prudence tiède des frileux, la léthargie tépide de ceux qui ne savent plus vibrer, des coincés du bulbe, l’apathie des soumis. La mollesse des objectifs sans tripes, la tiédeur. Non pas celle prémice des chaleurs d’été, mais plutôt la tiédeur fade du café oublié sur la table de la cuisine.
On en a fait un synonyme de la sagesse et et de la mesure, histoire de lui ripoliner le buffet, mais être raisonnable, c’est aussi se contenter de moins que ce qu’on pourrait avoir ou faire, brider sa sensibilité, son imagination, sa créativité, son pouvoir d’agir.
Dans ma vie professionnelle, être raisonnable, c’est aussi toutes ces stratégies d’échec issues des croyances sur l’absence de marge de manœuvre dont nous disposons pour façonner un peu de plaisir au travail. Les convictions qui ancrent les désirs d’ailleurs professionnels dans un raisonné-raisonnable qui produit davantage d’erreurs d’aiguillage que de motivation.
Bref: être raisonnable, c’est sinistre et ça ne fournit pas l’énergie nécessaire à soulever des montagnes professionnelles! Et ce n’est pas avec ça qu’on va se mettre le citron en pâmoison.
Au lieu d’être raisonnable… oser
Heureusement Manon Blondin passant par là a vu dans cette citation une occasion de lâcher prise et en a déduit un petit exercice simple et futé, qu’elle propose dans L’envie de faire autrement, une façon simple et légère comme une brise d’été de s’autoriser à sortir des normes, se libérer du qu’en dira-t-on, de la crainte du jugement et à oser faire ce qui nous tient à cœur. Elle suggère tout simplement de compléter cette phrase:
Si, au lieu d’être raisonnable,
je ……………………………………,
je ferais ……………………………………………..
Avec quelques exemples à la clé:
– Si, au lieu d’être raisonnable, j’avais le courage de mes convictions, j’irais lui parler.
– Si, au lieu d’être raisonnable, je sortais du cadre, j’innoverais sur ce dossier.
Exercice qu’on peut décliner d’autres manières, en fonction des “il faut”/”on doit” que vous vous imposez:
– Si, au lieu d’être réaliste, je…
– Si, au lieu d’être pragmatique, je…
– Si, au lieu d’être sensé, je…
Du coup, je l’ai testé sur moi et quelques clients. Ca donne des choses de l’ordre de:
– Si, au lieu d’être raisonnable, j’allais me balader, je reboosterais ma créativité. (du coup, je finis ce billet et je vais me balader;)
– Si, au lieu d’être discret, je faisais savoir que je suis intéressé par ce poste, j’aurais des chances de l’obtenir.
– Si, au lieu d’être réaliste, je laissais parler mes tripes, j’irais explorer mon envie d’ouvrir une boutique en ligne.
– Si, au lieu d’être sérieux, j’étais assertif, alors j’oserais dire non à mon chef.
– Etc.
La déraison, c’est laisser passer la lumière
Etre déraisonnable c’est ouvrir des portes, laisser l’absurde, l’extravagant, le fantasque trouver une place dans nos vies et risquer d’y trouver du plaisir, de la joie et au final, l’audace et le courage nécessaires à la mise en route d’un projet. “Heureux les fêlés, ils laisseront passer la lumière” disaient Audiard et Groucho Marx, alors cessons d’être un poil trop rationnels, réfléchis, sains, sensés, sérieux, soyons légers, loufoques, saugrenus et laissons ce qui nous tient vraiment à cœur nous guider. Que la lumière soit!
Et rassurons-nous, nous sommes capables de nuances fascinantes, aussi sortons des mondes binaires où les caractéristiques s’excluent sans autre forme de procès. Les contradictions apparentes sont souvent plus des consonances que des dissonances et il est tout à fait possible d’être à la fois déraisonnable et concret, fantasque et responsable, la tête dans les étoiles et les pieds sur terre.
Et si ce type n’avait pas été déraisonnable au point de s’approcher de cette baleine, la suite ne se serait jamais produite:
Voir aussi
Et vous, où aimeriez-vous vous réveiller?
Vie professionnelle: zone d’apprentissage, zone des possibles
La reconversion professionnelle, une affaire de tripes!
Aller plus loin
Vous voulez construire et entretenir un état d’esprit dynamique et serein à la fois, un état d’esprit propice à la réalisation de vos aspirations professionnelles? Pensez au coaching.
J’ai aimé à la déraison
Merci:)
Bonjour Sylvaine!
Je me suis gaussé en lisant votre texte. Spécialement le début “C’est encore la prudence tiède des frileux, la léthargie tépide de ceux qui ne savent plus vibrer, des coincés du bulbe, l’apathie des soumis”
Un vocabulaire riche qui se perd lorsque l’on a l’habitude de lire sur internet.
Je suis d’accord avec vous. Je vais d’ailleurs en faire un article. La raison ça pue. Mais faut-il trouver le juste équilibre? 😀
Evidemment, le bien-être, l’efficacité, le plaisir etc. se résument souvent à des questions d’équilibre. Mais l’équilibre est à définir individuellement, il ne se modélise pas, ne répond à aucune norme, à aucune vérité (forcément pseudo) universelle. IL ne s’agit donc probablement pas de trouver une méthode pour déterminer l’équilibre, ou même de trouver l’équilibre, mais d’exercer les deux en fonction de ce que l’on est, car raison et déraison ne sont bien entendu pas incompatibles, de les faire dialoguer, de parfois les laisser se débrouiller toutes seules et surtout d’éviter d’attribuer l’une ou l’autre en fonction des situations, ce qui serait absurde et contreproductif;)