12 distorsions cognitives courantes

Les distorsions cognitives, ces pensées spontanées biaisées et dévalorisantes, sont relativement courantes et nous torpillent l’estime de soi. En voici 12 à reconnaître pour les minimiser et mettre un brin d’élégance relationnelle y compris dans la relation à soi-même.

Nous l’avons vu dans , les pensées automatiques sont ces discours spontanés que nous avons avec nous même, dans notre Ford intérieure, comme disait Béru, sous la forme de commentaires sur nous-même, sur les autres, sur ce qui nous arrive ou la vie en général. Elles deviennent dysfonctionnelles, ou distorsions cognitives, lorsqu’elles sont excessives ou biaisées, même quand elles nous paraissent anodines, comme le classique « qu’est-ce que je suis maladroit(e), j’ai cassé le verre ».

Une fois que nous avons reconnu l’importance de nous parler à nous-mêmes avec bonté, logique, nuance et objectivité, il est alors essentiel de savoir reconnaître ces distorsions pour les minimiser. Voici donc 12 pensées dysfonctionnelles courantes qui nuisent à l’estime de soi, à l’acceptation de soi et à la capacité à agir.

1- La pensée dichotomique (ou fractionnement)

Lorsque nous nous évaluons nous-mêmes ou évaluons les événements de manière polarisée, sans nuance et en omettant le contexte : tout ou rien, noir ou blanc, jamais ou toujours, bon ou mauvais etc. Va souvent de pair avec le fait de penser que si quelque chose ne se passe pas exactement comme nous le souhaitons, alors il s’agit d’un échec personnel. Les plus petits manquements paraissent alors dangereux ou épouvantables :

  • « J’ai raté cet entretien d’embauche, c’est un échec total »
  • « Si je n’ai pas au moins 16 à 20 à ce DS, c’est que je suis nul » ou « c’est une catastrophe ». Dans ces conditions, avoir 15 ou n’être « que » le second de sa promo peut être perçu comme des échecs cuisants.

2- La généralisation abusive (ou surgénéralisation)

Tirer des conclusions générales et définitives, construire des pseudo-vérités universelles sur la base d’un seul ou quelques événements négatifs :

  • « Je n’ai pas eu ce job parce que je suis senior. Personne n’embauche un senior »
  • « Elle ne m’a pas confié ce poste, elle n’a aucune confiance en moi »
  • « Le recruteur m’a ghosté, tous des lâches »
  • « Tu as vu, ils ont viré Duschmoll ? Le monde du travail est pourri »

Avec la généralisation abusive, un seul événement négatif peut influer tout le comportement à venir d’une personne qui se voit alors vouée à l’échec. On peut distinguer deux grands types de généralisation abusive :

La surgénéralisation verticale 

Une expérience désagréable dans un domaine à un moment donné, et c’est tout le domaine en question (passé, présent et à venir) qui est perçu comme un échec et perdu d’avance : 

  • « Je n’ai pas obtenu cette promotion. J’ai toujours tout raté au boulot, je suis coincé dans le même poste pour toute ma vie”.

La surgénéralisation horizontale 

Lier entre eux des problèmes différents, là où il n’y a pas lieu de le faire. Une expérience désagréable dans un domaine va nous amener à voir des échecs dans tous les domaines : 

  • « J’ai été viré, ce n’est pas étonnant, je rate tout ce que je fais dans la vie ».
  • Les talents naturels, socle du plaisir d'agir, de l'assurance et de l'estime de soi

    3- La disqualification du positif 

    Lorsque nous transformons une expérience neutre ou positive en expérience négative, en considérant que le positif est complètement faux :

    • Mon chef me fait un compliment, mais « Il me dit ça juste pour me faire plaisir »
    • « Le soutien de mes collègues ne compte pas. Ils ne se rendent pas compte de mon incompétence »
    • J’ai eu 16 à mon DS de physique « Oui, mais je n’ai pas eu 18 »

    4- L’exagération (amplification ou minimisation)

    Ce sont des formes de dévalorisation qui consistent à exagérer ses erreurs et minimiser ses qualités ou ses accomplissements.

    • Exemple d’exagération : “J’ai fait une erreur sur le tableau de reporting, tout le monde va le savoir et je serai complètement ridicule aux yeux de tous.”
    • Exemple de minimisation : “J’ai trouvé la solution au problème, mais c’est un coup de bol”.

    5- Les conclusions hâtives ou inférences arbitraires

    Imaginer des scénarios noirs sans fondement ou preuve et y porter crédit. Pour rappel, une expérience préalable n’est pas une preuve, voir point 2.  Il existe deux sortes de conclusions hâtives :

    1- La lecture de pensée

    Lorsque l’on pense connaître les pensées et réactions probables des autres en se fiant à une poignée d’indices, souvent maigres :

    • « Inutile que je lui demande à mon prof de reporter le DS, il ne m’écoutera pas »
    • « Mon patron m’a regardé de travers, il veut me pousser vers la porte »
    • « Je l’ai croisée dans le couloir ce matin, elle m’a ignorée, elle doit avoir une dent contre moi »

    2- La voyance

    Ce sont des prédictions pessimistes que nous considérons comme vraies et incontournables :

    • « C’est sans espoir, ça ne changera jamais»
    • « Cette technique ne marchera pas, je suis incurable »
    • « Je ne retrouverai jamais de boulot »

    6- L’abstraction sélective

    Ce filtre mental ne laisse percevoir que le côté négatif des choses. En focalisant sur les détails déplaisants, nous faisons abstraction des éléments agréables, ce qui nous conduit à voir l’ensemble comme une expérience essentiellement négative :

    • Une personne assiste à un dîner avec des gens agréables et intéressants, elle s’amuse. Mais pendant le dîner, son voisin renverse du vin sur sa chemise. Elle en conclue que la soirée est totalement gâchée.
    • Un cavalier remporte un concours, mais au lieu de s’en réjouir, il ressasse les erreurs qu’il a commises pendant le parcours et se les reproche pendant des jours.

     

    L'estime de soi rend séduisant

    7- Le raisonnement émotionnel

    Ils se produit lorsque nous confondons nos émotions et la réalité, ce qui nous amène à utiliser nos sentiments comme s’il s’agissait de preuves que quelque chose ne va pas chez nous, ou que tout va mal :

    • « Si je suis désespérée, c’est bien parce que mes problèmes avec mon chef sont impossibles à résoudre »
    • « J’ai trop la trouille, je ne me sens pas de taille à affronter cette situation, je suis un looser »
    • « Je suis dégoûtée du monde du travail qu’il n’a rien à m’offrir »
    • « Je suis angoissé tout le temps, ça montre bien qu’il y a quelque chose qui ne va pas chez moi »

    8- Les faux raisonnements

    Le faux dilemme : croire que nous n’avons que 2 choix possibles, donc si l’un ne convient pas, l’autre devient incontournable

    • « Je ne peux pas partir avant 19h, je n’ai pas le choix, ça ne se fait pas dans ma boîte, c’est pour ça que je bosse tard »

    Le faux raisonnement de justice : penser que ce qui ne se passe pas comme nous le voudrions est injuste

    • « Je n’ai pas eu d’augmentation, c’est dégueulasse »
    Notre coté victime peut nuire à la recherche d'emploi

    9- Le catastrophisme

    Penser à une situation à venir sous l’angle du pire, imaginer tous les scénarios catastrophes possibles, les conséquences les plus désastreuses. Le catastrophisme peut pousser à éviter la situation, de peur que leurs scénarios se réalisent.

    • « De toute façon, je vais perdre tous mes moyens si je fais cette présentation, je vais passer pour un con »

    10- La personnalisation 

    Lorsque nous pensons, à tort, être responsables d’événements désagréables ou fâcheux pourtant hors de notre contrôle. Nous croyons avoir une influence très forte sur le comportement des autres et par extension nous nous en sentons responsables, ce qui conduit à un sentiment de culpabilité, ou encore croire que ce qu’ils font est lié à nous :

    • « Tartempion ne fout rien, je n’arrive pas à le faire bosser parce que je suis un mauvais manager »
    • « Mon boss est désagréable avec moi, c’est de ma faute »

    Le blâme est une autre forme de personnalisation, mais qui s’exprime à l’opposé : lorsque nous nous tenons pour responsables de ce qui arrive aux autres et en particulier des émotions désagréables qu’ils peuvent ressentir.

    11- L’étiquetage

    Qui revient à coller une étiquette, sous forme d’un qualificatif qui exprime un jugement définitif et émotionnellement chargé que l’on porte sur autrui ou sur soi-même. Il s’agit d’attribuer un comportement au caractère de la personne, sans considérer la possibilité qu’il soit circonstanciel ou momentané :

    • « Ce type est un con » au lieu de « Il s’est trompé dans ses calculs » ou « je n’aime pas ses idées »
    • « Je suis complètement nul » au lieu de « J’ai fait une erreur »

    8- Les fausses obligations

    Se fixer arbitrairement des buts à atteindre ou des règles de conduite excessives, sans tenir compte des ressources dont on dispose pour y parvenir (le plus souvent sous la forme « il faut », « on doit ») ou du contexte. Ces fausses obligations génèrent une forte pression auto-imposée. Ensuite, les éventuels objectifs non atteints entraînent des sentiments de déception, de frustration, de colère, de ne pas être à la hauteur :

    • « A mon âge, je devrais réagir autrement »
    • « Il faut que je sois au top au boulot en permanence »
    • « Je n’ai pas le droit à l’erreur »
    • « Je dois absolument obtenir une meilleure note au prochain DS »
    • « Il faut que je sois moins stressé au boulot »

    Les fausses obligations peuvent également être appliquées aux autres, ce qui peut conduire à des exigences excessives et/ou à un sentiment de déception, d’amertume, de ressentiment, y compris à l’idée que l’on est la seule personne à se conduire convenablement. L’impact sur les relations est bien entendu délétère :

    • « Après tout ce que j’ai fait pour lui, il devrait quand même être reconnaissant »
    • « Mais enfin, ça ne se fait pas ! »

    Modifier son discours intérieur

    Ces distorsions cognitives ont des noms techniques à coucher dehors, mais ça n’a pas d’importance, vous n’avez pas besoin de vous en souvenir, l’important étant simplement de prendre conscience de ce qui en est une, pour pouvoir la modifier tranquillement pour aller vers des pensées fonctionnelles. Celles-ci NE SONT PAS de la pensée positive, mais bien des pensées objectives, nuancées, qui prennent en compte le contexte de la situation, bref, qui la décrivent de manière rationnelle et observable, et non pas à coups d’interprétations, qu’elles soient négatives ou positives. Pour vous y aider, c’est par là: Modifier un discours intérieur

    modifier une discours intérieur

    Voir aussi

    Estime de soi: vous avez bien plus de ressources que nous ne le croyez!

    Estime de soi: renouer avec notre merveilleuse singularité (1)

    Les ratés de la communication: généralisations abusives

    Ratés de la communication: compliments et quand-mêmisations

    Petite leçon équine au service de l’acceptation de soi

     

     

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