Entretien d’embauche pendant une grossesse, mode d’emploi

 

J’ai été ravie de répondre aux questions de Opensourcing, puis de Terafemina sur un sujet peu abordé: comment mener une recherche d’emploi quand on est enceinte? Faut-il en parler? Comment l’aborder? Quels arguments pour convaincre un recruteur que ce n’est pas un problème? Autant de questions à soulever pour que polichinelle dans le tiroir ne rime pas avec merci et au revoir (- on vous recontactera).

 

La grossesse, un frein  la carrière des femmes

Le site Mode(s) d’emploi rapporte les résultats d’une étude  étude publiée par le Journaldesfemmes.com, pour 44% des femmes de 25 à 49 ans, être maman est un obstacle à leur carrière. Sentiment d’être mises à l’écart, carrière ralentie, salaire qui stagne, perte de responsabilités au retour au travail, la frustration est grande, mais les femmes, dans l’ensemble, se taisent par crainte des représailles.

Autant de tendances consternantes qui réussissent à convaincre les futures mamans qu’une recherche d’emploi pendant la grossesse ressemble à une mission impossible. Mais ‘avantage de la mission impossible, c’est que si elle demande des efforts, elle se révèle toujours possible.

 

Grossesse et idées reçues

Un peu comme l’excès de discours spécifiques sur les femmes ne leur rend pas toujours service (non, il n’y a pas de compétences “féminines” différenciantes), la sacralisation de la grossesse et des enfants a un effet pervers: au lieu d’être un phénomène absolument naturel et allant de soi, elle devient une sorte de stigmate, presque une pathologie.

Les idées reçues défilent en cohortes bien organisées autour des femmes enceintes, vite estampillées “à risque”, moins performantes, potentiellement absente autant pendant la grossesse qu’après (c’est bien connu, les femelles parturientes n’ont plus d’autre centre d’intérêt que leur progéniture), au détriment de leur carrière. Et ce sans distinction: ces vérités doivent forcément être universelle, dans un monde encore anté-ferroviaire dans lequel une femme ne se réalise qu’au travers de la maternité.

C’est comme ça que les femmes enceintes en recherche d’emploi se retrouvent confrontées à des portes peu ouvertes, et que d’autres femmes en recherche d’emploi remettent à plus tard leur désir de maternité pour cause d’autres priorités.

 

Cesser de faire tout un plat de la maternité et focaliser sur vos compétences

Avoir un enfant étant l’un des actes les plus naturels qui soient autant cesser d’en faire tout un plat et de sacraliser l’affaire comme s’il s’agissait d’un miracle qui mérite que tout s’arrête autour de la future mère. C’est sans doute pour cela qu’on peut suggérer aux femmes enceintes d’en faire un non-sujet dans leur recherche d’emploi. C’est à dire désacraliser l’affaire, lui redonner sa dimension naturelle et donc sans incidence, autre que le congé maternité, sur sa pratique et son engagement professionnels.

A ce titre, la recherche d’emploi lorsqu’on est enceinte est une recherche d’emploi comme une autre, et lors des entretiens, autant mettre en avant ses compétences, ses qualités, son expérience, sa valeur ajoutée comme dans n’importe quelle autre recherche d’emploi.

 

Prendre l’initiative d’aborder le sujet

Il est illégal pour le recruteur d’aborder la question, même si vous poussez devant vous un ventre joliment arrondi qui ne laisse aucune place à l’ambiguïté. Du coup, vous pouvez être tentée de ne pas aborder le sujet pour une raison simple expliquée dans cet article publié sur Keljob et intitulé Ce qu’il faut cacher aux recruteurs en entretien d’embauche, conseille “«de ne pas le dire lors du premier entretien. » Car une grossesse divulguée peut être, aujourd’hui encore, discriminante pour une femme.” Peut-être, mais dès que la grossesse se voit, c’est probablement une vraie fausse bonne idée, car cette stratégie a deux défauts:

 – Elle vous prive d’une occasion de démontrer que votre grossesse n’aura pas de conséquences.
 – Elle focalise l’attention du recruteur sur ce que vous ne dites pas et peut susciter l’idée que vous n’êtes pas franche du collier.

L’idée est donc d’aborder le sujet avec naturel et sans excès du genre dramatique “c’est une grossesse difficile et il est probable que que ce soit un enfant fragile” ou dégoulinant “je suis tellement heureuse, j’attendais ça depuis si longtemps et cet enfant comblera tous mes besoins et mes attentes”, les deux suggérant que ce bébé sera prioritaire sur votre travail. Cette affirmation de vous pendant l’entretien d’embauche donnera l’image sereine, authentique et convaincante d’une personne qui se sent totalement légitime dans sa démarche et donc qui transmet l’idée qu’elle l’est.

Et pour finir, je vous encourage à aller lire les deux articles:

 

Voir aussi

La confiance en soi, clé de la recherche d’emploi
5 trucs infaillibles pour ne pas retrouver un emploi
Gérer le stress de l’entretien d’embauche
Réseaux sociaux: 3 conseils d’utilisation pour les chercheurs d’emploi
Triangle de Karpman: comment les rôles relationnels peuvent entraver la recherche d’emploi
Entretiens d’embauche: 12 trucs pour minimiser le trac

 

Aller plus loin

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8 Comments

  • bibi dit :

    Bonjour,
    Il y a quelques temps j’ai passé un entretien d’embauche et je me posais beaucoup de questions (ce qui m’a d’ailleurs amené sur votre site).
    Je reviens tout simplement pour vous remercier, vos précieux conseils m’ont vraiment aidés (dire aussi aux autres femmes que c’est possible).
    Surtout le dernier paragraphe: j’y suis allée franco ni dramatique ni dégoulinant.
    Et bingo ça a marché, il m’a avoué après embauche que mon honnêteté lui était indispensable car effectivement aujourd’hui je m’occupe de toute la trésorerie de la boîte.
    Voilà pour moi, merci encore et pour celles qui hésitent encore foncez! habillez-vous class! vous êtes enceinte, vous êtes belle, vous êtes forte.Et même si ça ne marche vous vous direz “putain je l’ai quand même fais”

    • Sylvaine Pascual dit :

      Bravo pour le courage et merci pour le retour et le témoignage!
      Je rajoute un élément à votre conclusion: si ça ne marche pas, d’abord je l’ai fait et en plus, si la réaction a été négative, alors c’est une entreprise à tendance discriminatoire, et donc je n’ai pas particulièrement envie de bosser là-bas: double tant mieux!

  • Jessica dit :

    En tant que femme, je suis bien consciente de ce genre de situation, et c’est vrai, vouloir intégrer une entreprise pendant la période de grossesse est un vrai challenge. Merci à vous d’avoir donné ces précieux conseils, cela va aider beaucoup de personnes.

  • Liu dit :

    Bonjour,
    Je suis enceinte de 2 mois, ça ne se voit pas encore. Je vais être en phase finale de 3ème tour d’entretien avec le directeur général ou le président des différents boites.
    Vous me conseillez de les annoncer au moment de l’entretien ou alors quand RH reviendra vers moi avec une proposition?
    Merci beaucoup
    Camille

    • Bonjour Liu, voilà une question épineuse, car si la loi vous protège (vous n’avez pas à dire quoi que ce soit), on imagine bien que si vous ne dites rien, l’entreprise peut ensuite vous en tenir indirectement rigueur. En parler peut avoir des avantages et le 3e tour d’entretien devient le bon moment, en particulier si vous sentez que la confiance s’est installée. Si vous n’obtenez pas le poste à cause de votre grossesse (ce qui ne vous sera bien entendu pas dit, puisque c’est une discrimination illégale), vous saurez que vous êtes en d’une entreprise ou d’un DG/président aux valeurs douteuses. Et peut-être qu’il sera alors bon pour vous de ne pas aller travailler avec;)

  • Courgette dit :

    Bonjour,

    Enceinte de moins de deux mois et en recherche d’emploi, j’ai fait le tour des sites Internet pour savoir s’il fallait annoncer la grossesse à l’employeur, et quand. Tous les sites conseillaient de l’annoncer au cours du recrutement, à minima avant d’avoir une proposition concrète. Mon retour d’expérience montre que C’EST UNE GRAVE ERREUR !!!! J’ai annoncé ma grossesse juste après avoir eu un retour positif de l’employeur, qui a ensuite essayé de m’intimider et de me dissuader… Heureusement j’ai pu me défendre, car dans ce cas, il serait très facile de prouver qu’il s’agit de discrimination et donc d’engager des procédures contre l’employeur… Imaginez si vous l’annoncez avant que l’employeur ait rendu sa décision, il utilisera un prétexte “neutre” comme votre expérience, vos diplômes etc. pour vous adresser un refus. Et je ne suis pas sure que les employeurs (souvent des femmes d’ailleurs) se rendent compte qu’il s’agit d’une discrimination, pour eux c’est simplement un point négatif de votre profil comme le serait une faible expérience ou la non-maîtrise de tel logiciel… Hors cela n’a rien à voir, l’état de grossesse (comme le handicap ou la couleur de peau) ne peut pas influencer la décision du recruteur… Donc rendons-leur service : ne leur donnons pas d’éléments qu’ils ne pourront pas ensuite ignorer, mais dont ils n’auront pas le droit de tenir compte dans leur décision !

    • Effectivement, en l’annonçant, on prend le risque d’être discriminée… ce qui est la raison pour laquelle j’encourage à l’annoncer. Car fera-t-il bon travailler dans une entreprise qui n’a pas voulu de vous pour une raison de discrimination? Où vous êtes rentrée suite à un bras de fer juridique? Avez-vous envie de travailler dans une boîte capable de discrimination? A l’arrivée, chacune choisira la façon de faire qui lui convient pour les raisons qui lui conviennent, mais aucune option n’est pas une erreur en soi, c’est simplement une question de choix.

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