Réussites et accomplissements professionnels suscitent parfois une euphorie parfaitement énergisante… mais aussi, potentiellement envahissante à des moments peu opportuns. Une excellente nouvelle juste avant une situation à enjeu nous propulse ainsi sur un petit nuage qui peut être aussi boostant qu’il peut nous déconnecter de ce que nous avons à faire. Voici comment en garder les vitamines mentales sans se laisser déconcentrer.
L’euphorie de la réussite
L’autre jour, Frédéric me raconte comment il s’est planté… pas excès d’émotions positives. Le mardi matin, il avait une présentation importante devant la direction générale, qu’il a réussi avec brio. Il s’est montré convaincant, déterminé, il s’est exprimé avec élégance et sobriété, il a fait preuve d’un leadership qui a enchanté les personnes présentes. Une pluie de félicitations plus tard, son projet a reçu l’aval de l’entreprise, Frédéric, sur son petit nuage, est tout à l’euphorie de la réussite.
D’autant qu’ayant pris son poste deux mois et demi auparavant, il se sentait attendu au tournant. Par nature plutôt rentre-dedans et volubile, il estimait manquer de prestance et de la sérénité qui à ses yeux démontre la véritable assurance. D’ailleurs, le DG lui avait précisé “qu’il fallait qu’il se calme” et il travaille sa posture professionnelle depuis plusieurs semaines, en cherchant à concilier son franc-parler avec les exigences de son poste. Nous avons oeuvré autour d’un positionnement affirmé et apaisé à la fois. Il en récolte les fruits, il nage dans une joie intense. Et comme il commence à prendre conscience de le force des émotions, il s’autorise à la ressentir pleinement… un peu trop pleinement.
L’après-midi, il a une réunion dont l’enjeu est moindre, qui concerne l’implémentation d’un nouveau process. Il est totalement confiant: après sa performance du matin, rien ne peut l’arrêter. Il arrive à la réunion, toujours sur son petit nuage, submergé du plaisir que lui a procuré son accomplissement. Et du coup, peu concentré sur le sujet, il s’éparpille, se perd et fait une présentation confuse. “Vous comprenez, me dit-il, avec un sens de la nuance qui le caractérise, je suis passé pour un dieu auprès de la direction et pour un con auprès des opérationnels”.
Quand l’euphorie détourne l’attention
En d’autres termes, l’excitation l’a déconcentré au point de lui faire perdre ses moyens. De véritable source de vitamines mentales, l’accomplissement du matin est devenu un envahisseur contre productif, qui, à force de prendre trop de place, détourne l’attention des autres échéances du jour.
Savourer une réussite est bon pour l’estime de soi, pour le moral et la motivation. Inversement, tuer son plaisir à coups de rationalisations (genre “calmons-nous, c’est pas non plus un prix Nobel”) serait une idiotie: ne pas en profiter pour engranger une énorme dose de vitamines mentales serait un gâchis d’énergie et reviendrait à dévaloriser l’accomplissement – voir Mécanismes de valorisation et dévalorisation. Pour des questions de reconnaissance interne, c’est à dire de la reconnaissance que l’on s’accorde à soi-même, il est essentiel de prendre le temps d’apprécier nos accomplissements à leur juste valeur.
En même temps, lorsqu’ils interviennent juste avant une échéance, une tâche ou un événement, il devient important d’être en capacité de canaliser l’émotion pour ne pas se laisser submerger par elle et rester au 7ème ciel alors qu’on vous attend au troisième étage.
Euphorie de l’accomplissement et survalorisation
Une autre conséquence possible de l’euphorie due à un accomplissement majeur est la survalorisation. Se gargariser à l’excès d’une réussite et en tirer des conclusions de l’ordre de “je suis trop un winner” est l’autre face d’une même pièce que la dévalorisation: la marque d’une estime de soi encore fragile qui réagit en se sur-évaluant, là où d’autres pourraient se sous-évaluer – voir Valorisation, humilité et arrogance
Le risque est alors de voir l’immense joie d’l’exultation suite à un accomplissement d’ampleur nous pousser à nous reposer sur des lauriers surestimés, à faire preuve d’une complaisance stérile en des capacités peut-être pas si avérées que ça, à un excès de confiance qui risque de faire retomber le soufflé tout juste sorti du four.
Canaliser l’euphorie en énergie durable et se reconcentrer
Le plaisir énorme que nous ressentons sous forme de joie, d’euphorie, d’exultation face à un accomplissement de taille est une réaction bien légitime et n’est donc surtout pas à considérer avec mépris, en mode je-boude-mon-plaisir-parce-que-je-ne-suis-pas-un-gamin ou avec rejet, comme s’il s’agissait d’un ennemi presque aussi dangereux qu’une émotion négative.
Lorsqu’une nouvelle formidable ou un accomplissement de taille viennent dynamiser notre journée d’une exaltation jubilatoire un poil trop envahissante et que ladite journée est loin d’être terminée en termes de tâches importantes, d’échéances et d’objectifs, autant canaliser l’énergie récoltée pour éviter qu’elle se transforme en envahisseur invalidant, tout en capitalisant sur le plaisir immense qu’elle procure à juste titre. Nous pouvons alors en conserver du dynamisme, de l’enthousiasme, sans pour autant nous perdre dans des débordements d’allégresse centrée sur elle-même.
- Nommer l’émotion et s’autoriser à la savourer pleinement, pendant quelques minutes, seul(e) ou à plusieurs, en fonction de sa nature. Cela permet d’engranger des vitamines mentales et de signaler à notre cerveau que nous l’avons prise en compte, cette belle émotion. Bien nourri de ce plaisir, il est plus enclin à revenir dans un sentiment plus serein de satisfaction profonde. Voir aussi: Emotions et bienveillance
- Valoriser la réussite en faisant le bilan des qualités et compétences mises en oeuvre. Cette objectivation permet de soritr de l’excitation et de revenir dans un sentiment de satisfaction plus serein, moins subermgé. D’autre part, elle permet de renforcer l’estime de soi et la confiance en soi en mettant dans sa musette à capacités une belle preuve de celles qui se sont exprimées, et qui vont pouvoir être réutilisées. Voir aussi: Accomplissement et talents naturels
- Faire le point sur les autres objectifs du jour. Il n’y en a pas d’autres? passer directement à l’étape 5. Il en reste quelques uns? Faites la liste de ceux qui nécessitent votre attention. Cela permet un atterrissage en douceur, revenir dans le réel.
- Revenir dans ses objectifs en réfléchissant aux qualités, talents et compétences à mettre en oeuvre (et comment) pour les atteindre. Cela permet de se reconcentrer, tout en exploitant, potentiellement, ceux mis en oeuvre dans la précédente réussite. L’estime de soi va apprécier. Voir aussi: Leadership, efficacité, les états de grâce.
- S’offrir un moyen de céléber et savourer encore l’accomplissement du jour, une fois la journée terminée, histoire d’en faire toute une histoire de vitamines mentales;) Il n’est pas indispensable de voir trop grand et de se sentir obligé d’inviter tout le service au resto. Il suffit d’associer la réussite avec une activité ou des personnes qui vous font réellement et profondément plaisir.
Et juste après avoir rédigé ce billet, je suis tombée sur un article de Geneviève Desautels, qui décrit une situation assez proche, une lecture complémentaire, donc:
Un seul truc pour vous libérer de vos émotions
Voir aussi
La lecture émotionnelle au service du bien-être
Eloge du plaisir
Rôle des émotions: la joie
De la dévalorisation au regard bienveillant
Leadership de soi: préalable indispensable au leadership tout court
Les talents naturels au coeur de nos émotions
Aller plus loin
Pour construire, entretenir et développer un état d’esprit à la fois dynamique et serein, propice à la réussite de vos objectifs professionnels, pensez au coaching. Pour tous renseignements, contactez Sylvaine Pascual au 01 39 54 77 32