Relationnel et Dr House dans un même titre, ça tient de l’oxymore aguicheur, j’en conviens. Mais en vertu du bon principe du bon docteur en question, “tout le monde ment”, ce qui ne facilite pas la relation et en affirmant cette vérité universelle un poil péremptoire, il nous donne des clés pour y remédier et favoriser des relations plus fluides. Je vous propose donc de partir explorer nos petits mensonges entre amis et collègues…
Tout le monde (se) ment
Que celui qui n’a jamais versé dans les petits arrangements avec lui-même nous jette le premier gravier et nous donnerons joyeusement dans l’auto-lapidation collective pour nous repentir de ne pas être ce merveilleux super-héros, qui répond au nom délicieusement aristocratique de Captain Javel de la Vérité. Ô gloire à celui dont l’estime de soi n’a pas de pellicules et sent bon l’amande douce!
Pour nous autres, simples mortels sans super pouvoir, c’est un peu plus dur. Nous jetons un voile pudique à nos propres yeux sur certaines caractéristiques que nous n’apprécions pas, nous enrobons nos actes parfois peu cohérents avec nos discours dans les papier cadeaux des valeurs, nous refusons d’admettre nos sentiments, etc. Et du coup, nous nous mentons à nous-mêmes et par là même, nous mentons aux autres. D’ailleurs, selon Dan Ariely, professeur de psychologie et d’économie comportementale à l’université de Duke (Etats-Unis), nous avons une forte tendance à mentir “juste un peu”.
Et ça n’est pas une tare rédhibitoire: en vertu du principe que tous nos comportements visent un bénéfice, si le mensonge existe, c’est aussi qu’il a une utilité. D’autre part, nous mentons tous et ça ne nous empêche pas d’être des gens très bien, Il ne s’agit donc pas tant de pointer du doigt les affreux arrangements avec la vérité des autres, mais d’explorer les rouages de nos petits et grand mensonges, leurs bénéfices et leur limites. Et d’en profiter au passage pour améliorer la qualité de nos relations.
Tout le monde ment
Pour nous préserver d’un jugement, par auto-aveuglement ou méconnaissance de soi, parce que nous avons fini par croire aux discours que nous nous tenons à nous-mêmes, pour éviter de fâcher, nous mentons tous, en particulier sur qui nous sommes et ce que nous pensons. Je ne parle pas ici de vilains mensonges volontairement destinés à tromper cet autre, forcément ennemi malfaisant ou proie manipulable, mais plutôt de ces petites choses pas tout à fait vraies que nous disons plus ou moins consciemment sur nos sentiments et émotions, sur notre expérience de vie, notre histoire personnelle et professionnelle.
Dans un sens comme dans l’autre, d’ailleurs, car une histoire embellie ou une autre minimisée peuvent potentiellement avoir le même résultat sur l’estime de soi et les relations: en diminuer ou en augmenter la qualité, selon la nature et la raison du mensonge.
Je ne parle pas ici de ce jardin secret que nous cultivons tous et qui ne regarde personne: à la transparence cristalline nul n’est tenu. Je parle de ces petites failles de l’authenticité qui peuvent avoir toutes sortes de bénéfices immédiats:
– Nous montrer sous notre meilleur jour
– Préserver quelqu’un
– Ne pas décevoir
– Renvoyer à l’interlocuteur l’image qu’il a de nous
– Nous mettre en valeur
– Eviter le conflit ou la confrontation
– Eviter nous de montrer tel que nous sommes
– Cacher à nous-mêmes un trait que nous considérons négatif
– Eviter le jugement, le rejet, la désapprobation
– Eviter la réaction de l’interlocuteur
Les remèdes du Docteur House
Quel rapport avec notre bon docteur grand spécialiste du mensonge? Dans l’affirmation que tout le monde ment se cache une sorte d’antidote aux relations pourries: si nous voulons réellement savoir à quoi nous en tenir sur la personne qu’est le nouveau collègue, le chef ou tout autre interlocuteur potentiel, autant ne pas se contenter de ce qu’il ou elle dit, puisqu’il ou elle (se) ment et donc transmet des informations qui, comme disait Béru, nous enduisent d’erreur. Mieux vaut prendre le temps d’observer froidement les faits pour les analyser, plutôt que de croire sur parole Dupont-Durand quand il vous affirme qu’il est la droiture même, au risque d’être bien déçu lorsqu’il aura œuvré dans l’ombre pour obtenir cette promotion à votre place.
A l’inverse, pour éviter d’envenimer inutilement une relation autrement parfaitement acceptable, ou de heurter gratuitement ses contemporains, il est bon de distinguer les moments où l’excès d’authenticité peut avoir des effets pervers.
Le Dr House nous offre ainsi un moyen de protéger ses fesses dans la relation et d’éviter ainsi attentes vaines, déceptions et ressentiment. Combien de personnes se sont associées ou ont monté des partenariats sans déceler certains traits qui se sont avérés par la suite invivables, comme des conflits de valeurs? Combien d’entre nous se sont enthousiasmés pour une relation a priori excellente et qui a pourri plus vite qu’un cèpe après les premières gelées? Nous aurons l’occasion d’explorer le sujet en détails:
- Mensonge et tromperie sur la marchandise
- Le mensonge comme compétence relationnelle
- Voir l’autre au delà de ses arrangements avec lui-même et/ou avec la vérité: le cocktail relationnel du Dr House
Et n’imaginez pas que je vais vous servir du décodage des boniments d’autrui en trois coups de cuillère à pot par l’observation du langage du corps! Il ne s’agit pas tant de s’escrimer vainement à devenir un parfait petit détecteur de mensonges que de mieux percevoir nos interlocuteurs, mieux comprendre leurs contradictions, leurs craintes, leurs motivations, leurs fonctionnements et d’en tirer des conclusions sur les cercles relationnels dans lesquels nous allons les placer, en fonction du degré d’intimité que nous allons accorder à la relation: proches, connaissances/collègues ou étrangers. C’est donc une sorte de cocktail préventif aux relations pourries;)
Et vous, comment vous y prenez-vous pour mieux cerner vos interlocuteurs?
Comment décidez-vous le degré de proximité que vous allez accorder la la relation
Comment choisissez-vous vos associés, vos partenaires, vos clients, vos collaborateurs?
Voir aussi
Se mentir à soi-même: miroir du manque
A cache-cache avec soi-même: quand l’action contredit la pensée
Répondre au besoin de reconnaissance
Du bénéfice de la connaissance de soi
10 bonnes raisons de se moquer du regard des autres
Connaissance de soi: les valeurs morales
Connaissance de soi: belles contradictions
4 moyens infaillibles de se pourrir les relations
Crédit photo: pixabay
Aller plus loin
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J’ai noté qu’on avait souvent tendance à reprocher aux autres nos propres travers. Qu’on n’aimait pas chez les autres nos propres petits arrangements et autres petits défauts. Donc, si j’inverse la proposition, pour savoir ce que l’autre me cache, je peux écouter ce qu’il dit de moi, c’est très riche en enseignement (et c’est facile, il y a beaucoup à me reprocher ! )
C’est en effet une piste! Nous passons beaucoup de temps à parler de nous-mêmes quand nous parlons des autres. Soit parce que nous reprochons aux autres nos propres travers, soient parce que nous leurs reprochons ce que nous n’arrivons pas ou ne nous autorisons pas à faire;) Il y a donc effectivement beaucoup à apprendre de ce que les autres nous reprochent;)